Pierre Viret et la diffusion de la Réforme

Pensée, action, contextes religieux

Crousaz, Karine, Solfaroli Camillocci, Daniela,

2014, 421 pages, 29 €, ISBN:978-2-88901-054-7

Pasteur, théologien et conseiller de princes, Pierre Viret est à la fois l’auteur d’une vaste œuvre littéraire à grand succès dans l’Europe du XVIe siècle et le seul réformateur issu du pays romand. Il est au centre de ce colloque qui s’intéresse autant à son œuvre et à son action, qu’aux contextes religieux dans lesquels elles s’inscrivent. Dix-huit contributions des meilleurs spécialistes permettent d’éclairer sous un jour nouveau cette figure emblématique de la Réforme.

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Description

Pasteur, théologien et conseiller de princes, Pierre Viret (1509?-1571) est à la fois l’auteur d’une vaste œuvre littéraire, qui a rencontré un grand succès dans l’Europe du XVIe siècle, et le seul réformateur issu du pays romand. Il est au centre de cet ouvrage qui s’intéresse autant à son œuvre et à son action qu’aux contextes religieux dans lesquels elles s’inscrivent.

Dix-huit contributions des meilleurs spécialistes, croisant les approches littéraires, socioculturelles et d’histoire des idées, éclairent sous un jour nouveau ce personnage encore méconnu, qui a pourtant joué un rôle emblématique dans la diffusion de la Réforme en Suisse et en France. 

Les articles sont publiés dans leur langue originale, en français ou en anglais, et sont tous accompagnés d’un substantiel résumé dans l’autre langue.

Table des matières

  • Introduction (Karine Crousaz et Daniela Solfaroli Camillocci)

I. L’Écriture, la tradition et les grands adversaires: aspects de la pensée théologique et du travail littéraire de Viret

  • La question de la prédication: la théorie homilétique de Pierre Viret et le caractère rhétorique de ses sermons conservés (Olivier Millet, Université Paris-Sorbonne)
  • Pierre Viret on the Eucharist (Lee Palmer Wandel, University of Wisconsin – Madison)
  • Pierre Viret and Nicodemism (Carlos Eire, Yale University)
  • Pierre Viret et l’Islam (Karine Crousaz, Université de Lausanne)
  • Viret aux origines des sciences religieuses: de la mythologie à l’ethnographie (Olivier Pot, Université de Genève)
  • Le jeune Pierre Viret et les Pères de l’Église (Frédéric Amsler, Université de Lausanne)
  • Pierre Viret, historien de l’Église (Irena Backus, Université de Genève)
  • Une théologie des lettres divines. Le cas de l’Epistre consolatoire de 1541 (Georges Besse)
  • Pierre Viret et sa ménagerie de papier (Pierre Dubuis, Université de Lausanne)

 II. Viret réformateur, de l’espace romand à la France : action, réseaux et contextes religieux

  • Pierre Viret’s Epistolary Life and Corpus (Michael Bruening, Missouri University of Science and Technology)
  • Pierre Viret et ses imprimeurs (Jean-François Gilmont, Université Catholique de Louvain)
  • Neither Catholic nor Reformed: The Challenges Faced by Pierre Viret, Guillaume Farel, and the First Reformers in the Jointly Held Territories (James J. Blakeley, St. Joseph’s College, New York)
  • Du prédicant de la « Dispute de Lausanne » au rédacteur des Actes: Pierre Viret et la construction du ministère pastoral comme figure d’autorité (1536-1548) (Geneviève Gross, Université de Genève)
  • Faut-il prier pour les morts? Un débat de pastorale entre Viret et Caroli (Olivier Labarthe, Société du Musée historique de la Réformation, Genève)
  • L’influence de Pierre Viret dans une proposition d’assistance publique à Lausanne, l’ordonnance des pauvres de 1550 (Claire Montengou Barats, Université de Genève)
  • A Dissonant Alliance. Viret and the Zurich Reformers (Christian Moser, Universität Zürich)
  • Pédagogies en combat: Pierre Viret et les jésuites à Lyon (Daniela Solfaroli Camillocci, Université de Genève)
  • L’héritage de Pierre Viret en Béarn (Philippe Chareyre, Université de Pau et des Pays de l’Adour)

Presse

Dans la Revue de l’histoire des religions 

Dix-huit contributions, en anglais ou en français (avec un résumé substantiel dans l’autre langue) composent cet important volume publié à la suite du colloque international tenu à l’université de Lausanne en septembre 2011, pour le cinquième centenaire de la naissance de Pierre Viret (1511‐1571) – bien que la date soit sans doute à situer entre février 1509 et février 1510. L’incontestable qualité de cette rencontre organisée par Karine Crousaz (Université de Lausanne), et Daniela Solfaroli Camillocci (Institut d’histoire de la Réformation de l’Université de Genève) est non seulement de sortir de l’oubli ce grand réformateur vaudois originaire d’Orbe, malheureusement écrasé par la stature de ses coreligionnaires genevois, Guillaume Farel, Jean Calvin ou Théodore de Bèze, mais aussi de renouveler le livre de Jean Barnaud, Pierre Viret, sa vie et son œuvre (1511‐1571), (Saint-Amans [Tarn], Carayol, 1911), qui reste toutefois un ouvrage de référence sur le réformateur.

Cette légitime mise en lumière de Pierre Viret et de son action avait d’ailleurs été anticipée par l’excellent livre de l’historien américain Michael W. Bruening publié en 2005 et traduit en 2011: Le premier champ de bataille du calvinismeConflits et Réforme dans le pays de Vaud 1528‐1559 (traduction de l’anglais par Marianne Enckell, Lausanne, Antipodes). L’auteur y montre que Viret a exercé une influence aussi importante que Jean Calvin dans le développement de « la nouvelle foi » en terres francophones, après que le réformateur de Genève, incapable d’imposer à la Réforme suisse sa conception de la célébration de la Cène, se fut tourné vers la France, laissant à Zwingli le reste du territoire helvétique. On peut en outre mentionner les ouvrages récents de Dominique-Antonio Troilo, L’œuvre de Pierre Viret: l’activité littéraire du réformateur mise en lumière (Lausanne- Paris, L’Âge d’homme, 2012); et Pierre Viret et l’anabaptisme: un réformé face aux dissidents protestants, Lausanne, Association Pierre Viret, 2007).

Dans une solide introduction, les éditrices du colloque soulignent, parmi d’autres, trois fruits de la relecture des sources. D’abord, il convient de considérer Pierre Viret comme un « réformateur à part entière et non comme un vulgarisateur de Calvin », rôle que lui attribuait trop unilatéralement l’historiographie du XIXe siècle. Loin d’être un « réformateur mineur », Pierre Viret apparaît bien comme original et important. Plusieurs contributions vont dans ce sens. Ce colloque fait donc œuvre de « décalvinisation » de Viret. Autre fruit: l’œuvre de Pierre Viret dépasse amplement le simple cadre vaudois. Elle s’étend à la Suisse actuelle, à la France, au Béarn et aux pays rhénans. Viret exerce son influence dans les bailliages de Berne et de Fribourg (1550), à Lausanne où il joue un rôle crucial dans l’adhésion de la ville à la Réforme. De Lausanne, Viret se rend à Lyon (1563 et 1565), après avoir visité Genève et Nîmes. À Lyon, il s’attaque à Edmond Auger et aux jésuites. Puis, de 1567 à 1571, après un séjour en Languedoc, il termine sa vie en Béarn au service de Jeanne d’Albret. Il y est mort trop tôt pour laisser une empreinte durable, ce qui a contribué à laisser sombrer son œuvre dans l’oubli. Enfin, le colloque met en évidence la variété des écrits de Pierre Viret. Avec une cinquantaine d’ouvrages, il vient juste après Calvin dans la production genevoise.

Les textes sont répartis en deux grandes parties égales, avec neuf articles chacune. La première est consacrée, à partir des écrits viretiens, à la pensée théologique et au travail littéraire du réformateur. La seconde partie s’attache à l’engagement de Pierre Viret dans l’implantation et la diffusion de la Réforme, depuis ses premières prédications en Suisse jusqu’aux années en France, immédiatement avant et après la mort de Calvin, en particulier à Lyon en 1563 et 1565, puis dans le Béarn. Le volume s’achève par deux index, l’un des noms et l’autre des lieux.

Dans la première partie, Lee Palmer Wandel (« Pierre Viret on the Eucharist ») démontre que dans son livre Des Actes de vrais successeurs de Jésus-Christ, Pierre Viret comprend la Cène à la manière zwinglienne, comme un acte commémoratif et non comme une célébration qui transformerait celui qui y participe. De même, Viret paraît plus intransigeant que Jean Calvin sur le droit de révolte qu’il légitime à partir de 1559 dans le cas des tyrans. Dans « Pierre Viret and Nicodemism », Carlos Eire affirme qu’ayant été persécuté par les papistes, le réformateur vaudois était encore mieux habilité à parler des « nicomédites ». Il invite même à la résistance active au cas où le pouvoir s’écarterait de l’Écriture. La passionnante intervention de Karine Crousaz sur « Pierre Viret et l’Islam » met en évidence l’esprit ouvert et « tolérant » du réformateur vis-à-vis des autres religions et particulièrement de l’islam. Viret apparaît favorable à la lecture du Coran, non pour se défendre des « mahométans », comme le désiraient Martin Luther et Heinrich Bullinger, mais pour mieux le comprendre et aboutir, par mode de comparaison, à une meilleure appréciation de la Bible. En d’autres termes, Viret instrumentalise finement le Coran pour réfuter le papisme, comme il se fait l’apologiste des autres religions pour prouver qu’elles sont moins nocives que celle de Rome. Dans « Pierre Viret, historien de l’Église », Irena Backus analyse avec soin les deux éditions (1554‐1559) du Des Actes des apostres de Jesus Christ et des apostats de l’Eglise et des successeurs tant des uns que des autres. Pour la première fois, un réformateur utilise des sources romaines pour rédiger son histoire de l’Église. Si l’intention pacifique est louable, l’auteur ne parvient à satisfaire aucun des deux camps.

La deuxième partie, intitulée « Viret réformateur, de l’espace romand à la France: action, réseaux et contextes religieux », analyse la place de Pierre Viret dans la diffusion de la théologie réformée. Michael W. Bruening (« Pierre Viret’s Epistolary Life and Corpus ») utilise les résultats de son édition critique de la correspondance du réformateur (Genève, Droz, 2012), pour donner à Viret le statut de théologien et pasteur, et non pas seulement celui de disciple de Calvin. L’étude de Daniela Solfaroli Camillocci (« Pédagogies en combat: Pierre Viret et les Jésuites à Lyon ») est fort intéressante: elle rend compte des difficultés rencontrées par Pierre Viret lors de son séjour lyonnais face aux catholiques à nouveau puissants dans la cité. L’auteur montre de manière convaincante comment, par ses écrits polémiques, le réformateur défend la cause des réformés contre les attaques violentes de ses adversaires, notamment Edmond Auger, sur la question de l’autorité. Sans rendre compte de toutes les études de ce volume, on ne peut que saluer sa qualité. Les éditrices souhaitent que cet ouvrage collectif fasse avancer l’état de la recherche encore à ses débuts. À ce succès, s’ajoute celui d’y donner goût.

Stéphane-Marie Morgain, Revue de l’histoire des religions, 1/2018, pp. 177-179. 

 

Dans la revue Études théologiques et religieuses

L’ouvrage dédié au réformateur vaudois est le fruit d’un colloque international organisé par l’Université de Lausanne dans le cadre du 500e anniversaire de la naissance de Pierre Viret (1511-1571). Le volume, qui réunit dix-huit contributions très variées, dont certaines rédigées par des chercheurs nord-américains anglophones, laisse apparaître le pasteur et théologien comme un réformateur à part entière, et non comme un modeste collaborateur de Calvin. Il permet d’évaluer combien l’influence de Viret déborde sa région suisse romande d’origine pour s’étendre sur le royaume de France et celui de Navarre, tout en mettant en exergue son oeuvre écrite abondante.

Le livre est construit en deux grandes parties. La première aborde la pensée théologique du réformateur. Seuls cinq sermons de Viret nous sont encore accessibles, mais ils montrent ses qualités rhétoriques, l’influence d’Augustin et celle d’Érasme, de même que la proximité des méthodes exégétiques avec Melanchthon. Dans ses écrits, sa conception de la Cène, qui sépare radicalement le spirituel du matériel, est très proche de celle de Zwingli, plus que de celle de Calvin. Concernant les relations au politique, et à rebours de la clandestinité valorisée par les Nicodémites, Pierre Viret soutient la résistance ouverte à la tyrannie et envisage le recours à la violence plutôt que l’alternative du martyr et de l’exil envisagée par Calvin. L’une des études porte sur la perception que Viret eut de l’Islam: comme chez Luther, le Turc est considéré comme un ennemi équivalent aux chrétiens ennemis de la vraie foi. Si la religion musulmane est selon lui pleine d’erreurs, il partage son rejet de la vénération des images et, vers la fin de sa vie, il tend à minimiser les écarts théologiques entre les monothéismes abrahamiques, se montrant plus inquiet devant l’émergence de l’athéisme. D’autres articles donnent à évaluer la richesse de sa réflexion, nourrie par son intérêt pour la mythologie et les moeurs des peuples, pour la lecture des Pères de l’Église et l’histoire du christianisme.

La seconde partie permet d’évaluer le rayonnement de Pierre Viret. Son abondante correspondance (quelques 900 lettres nous sont parvenues, mais ne représenteraient qu’une faible portion des courriers qu’il a rédigé) montre l’étendue de son réseau en suisse, au Pays de Montbéliard et dans la vallée du Rhin. Viret fit publier de nombreux traités durant son ministère pastoral à lausanne de 1536 à 1559, puis dans la période de son activité en France, en particulier à Nîmes, Lyon et Pau. Il défend la diffusion des idées réformatrices et travaille à l’implantation pérenne de communautés protestantes. Il participe à plusieurs controverses pour repousser les attaques des théologiens catholiques. De 1567 à 1570, la reine Jeanne de Navarre lui confie une charge de superviseur des paroisses. Il prépare l’organisation de l’Église du Béarn, passée à la réforme, en inspirant les ordonnances ecclésiastiques promulguées après son décès en 1571. Mais les pasteurs semblent avoir peu apprécié le rôle prépondérant accordé par Viret au ministère des anciens, rôle qui pourrait être l’une des raisons de l’éclipse du réformateur dans l’historiographie béarnaise.

Marc Frédéric Muller, Études théologiques et religieuses, 92, 2017/1, pp. 341-342

 

Dans la English historical review

The black walnut tree is well known for being toxic to everything that growsbeneath its canopy. Jean Calvin had the same effect on other Protestantreformers within his orbit, overshadowed by his pervasive brilliance, whichwas in turn reinforced by Geneva’s institutional foundations and sustenance. One of those who suffered this unintentional suffocation was Pierre Viret, thereformer from the francophone Suisse Romande who launched the religiouschanges at Neuchâtel before being appointed pastor at Lausanne in 1536. Hedirected the reformation there for twenty-three years before being eventuallyousted in 1559 by the authorities in Bern. Retiring briefly to Geneva, he spentthe last decade of his life (from 1561 to 1571) in the kingdom of France and the principality of Béarn, in places where the hopes and disappointments ofits Protestant reformation were at their strongest. Controversy dogged himwherever he went in that decade. His opponents recognised him for what hewas—a Protestant theologian of ability, with a talent for polemic (who hadtaken up controversial positions on important practical issues), and experiencein the institutionalisation of the Protestant reformation. Only in recent yearshas his substantial published output received the attention it deserves.

 
This collection, edited by Karine Crousaz and Daniela Solfaroli Camillocci, results from an international colloquium to mark the 500 th anniversary of hisbirth, hosted at the University of Lausanne in September 2011. It assembles eighteen contributions that consider various aspects of Viret’s thought andactivities in the context of the religious changes of the reformation. It should be read alongside the substantial monograph, published by Dominique-Antonio Troilo (L’oeuvre de Pierre Viret, 2012), which contains (besides adetailed evaluation of his career and writings) the definitive bibliography of his many published works. It also complements the recent useful editionof his patchy correspondence (155 letters, edited by Michael W. Bruening, 2012—summarised in one of the chapters here). Taken together, these worksremove Viret from Calvin’s shadow, and demonstrate his forte as a theologian, someone who was able to translate his ideas into polemical statements of undoubted force as well as justifications for institutional changes which heheaded up. He was not simply Calvin’s vulgarisateur. 
 
His gifts as a preacher are revealed in this collection by Olivier Millet, analysinga limited corpus of five sermons in order to reveal that the sources of his theology went well beyond borrowings from Calvin. Frédéric Amster confirms the pointby documenting the extent to which the young Viret, in his earliest collectionof dialogues (the Disputations chrétiennes, 1544) uses evidence from the Church Fathers to show how doctrines and practices of the Roman church could betraced back to pagan Antiquity, in order then to turn the anti-paganism of the Fathers against it. Irene Backus cements the point with her examination of Viret as an ecclesiastical historian, showing how (equally impressively) he used Catholic patristic and canon-law sources to document the arrival and influence of Antichrist (albeit modifying his view between the different editions of the Desactes des apostres de Jesus-Christ (1554; 1559). His eucharistic theology (carefully explored by Lee Palmer Wandel) leaned towards Zurich in its radical separationbetween matter and spirit, even though his relations with the Antistes of that citywere clouded (according to Christian Moser) by disputes over church discipline. His anti-papal satires are among the best known of his works, but Olivier Potexamines them afresh to reveal how Viret’s strategy of exploring the historicalgenesis and development of ‘superstition’ led him to a novel comparative ethnography of religion. That chapter can profitably be read alongside the oneby Pierre Dubuis, who explores Viret’s uses of animal metaphors, drawn fromPliny, Plutarch and Aristotle, to create a Reformed bestiary. Karine Crousazshows how Viret’s polemical purposes led him to compare Islam favourably tothe Catholic Church at certain points (notably on the veneration of images andthe real presence). In the midst of the French civil wars, the comparison turnedthe Turks into models of religious tolerance.
 
Troilo’s monograph has examined much of what there is to say about Viret’s practical engagement as a reformer. However, Geneviève Grosse is able to showhow Viret turned his possession of the records of the Lausanne Disputation (1536) into a foundational text for its reformation. Claire Moutengou Baratsdocuments Viret’s influence over the Lausanne ordinance for poor relief, and hisrole in mediating the tensions over the destiny of former ecclesiastical property. Carlos Eire emphasises in a fresh way how Viret’s attitude towards nicodemiteswas more strident and uncompromising than Calvin’s and lay at the base of hisunambiguous advocacy of armed resistance to idolatrous tyrants, well before theoutbreak of the French civil wars. Concerning Viret’s last decade, the collectionis less rich. However, Daniela Solfaroli Camillocci throws interesting new lighton the debate between Viret and the Jesuits in Lyon, especially Emond Auger, toshow how one clever pedagogue knew the strengths and weaknesses of another. Finally, Philippe Charèyre uses new documentation to show how his last shortperiod of time in Béarn laid the basis for the Ecclesiastical Ordinances of its Protestant reformation. Viret’s will, published here for the first time, reveals howmany unpublished manuscripts he left behind him, now lost to us. This collectionshows that, for all his polemical prolixity, Viret was a force to be reckoned with.
 
M. Greengrass, English Historical Review, volume 131, numéro 553, décembre 2016, pp. 1510-1511

 

Dans la revue Renaissance and Reformation / Renaissance et Réforme

Ce volume rassemble dix-huit communications prononcées à Lausanne en septembre 2011 à l’occasion du 500e anniversaire de la naissance du réformateur vaudois Pierre Viret (1511–1571), un auteur francophone de premier plan aux côtés de Jean Calvin et de Guillaume Farel. Ce recueil, qui était attendu et qui ne déçoit pas, rendra désormais difficile de qualifier plus longtemps Viret « de réformateur oublié » (the Forgotten Reformer) suivant l’expression de Robert D. Linder.

L’édition est bien réussie sur le plan de la qualité scientifique et découle du travail concerté du comité d’organisation du colloque (Irena Backus, Danièle Tosato-Rigo et al.) et de plusieurs autres personnes remerciées dans l’introduction signée par Karine Crousaz et Daniela Solfaroli Camillocci. On regrettera d’emblée, sans le déplorer outre mesure, que certaines études importantes sur Pierre Viret – publiées après la tenue du colloque et avant la parution du présent volume (avril 2014) – ne soient pas mieux intégrées à l’ensemble. Heureusement, le recueil ne passe pas sous silence l’immense étude bibliographique sur Viret réalisée par Dominique-Antonio Troilo (Lausanne: L’Âge d’Homme, 2012) et que Jean-François Gilmont qualifie de magistrale dans sa contribution (235, 253). Ces remarques valent aussi pour les travaux de Ruxandra Vulcan et, dans une moindre mesure, pour ceux de Michael Bruening, puisque ce dernier, outre le travail de relecture des traductions des actes qu’il a effectué pour ce recueil, attire l’attention sur ses recherches épistolaires publiées après le colloque, mais avant la présente édition (219–234). On trouvera néanmoins dans sa contribution au colloque des apports biographiques et contextuels intéressants relatifs aux controverses de Viret avec Zébédée, Bolsec et Bauhin entre 1548 et 1565. Toujours dans la veine biographique, le livre apporte des pièces nouvelles concernant la date de naissance du réformateur et une étude significative de Philippe Chareyre sur l’héritage du réformateur en Béarn avec des sources reproduites en annexe.

Globalement, les angles d’approches sont multiples, originaux (notamment les communications sur l’Islam, l’économie et l’ethnographie) et jettent plusieurs éclairages sur la spécificité du réformateur parmi ses coreligionnaires. Les sources de sa pensée, notamment patristiques et classiques, sont mieux identifiées que dans les études antérieures. L’enquête reste toutefois à être élargie aux publications plus tardives de Viret. Le volume propose aussi des approfondissements et des explorations sur des aspects inédits ou peu connus des activités littéraires du réformateur, de sa pensée et de sa pratique pastorale.

L’ouvrage, qui offre une belle unité, se compose de deux parties. La première, fondée principalement sur les oeuvres imprimées de Viret, est consacrée à la pensée théologique et au travail littéraire de ce dernier. La seconde partie du livre suit Viret dans son engagement pour l’implantation et la diffusion de la Réforme tout au long de son ministère et aborde la question de sa « mémoire ». Ici, les sources utilisées consistent souvent en des documents d’archives et de la correspondance, en plus des ouvrages publiés. La documentation exploitée, abondante et diversifiée, vise cependant la représentativité et non l’exhaustivité. Plusieurs articles souvent cités ailleurs ne figurent pas dans l’apparat critique de certaines communications. Une bibliographie d’ensemble des études consultées (pour faciliter le repérage des textes) fait aussi défaut, mais le lecteur trouvera à la fin du volume un index des noms et des lieux réalisé par Claire Moutengou Bararts.

Parmi les contributions novatrices de l’ouvrage, trois retiennent l’attention. Premièrement, Viret est reconnu comme un réformateur à part entière et non plus dans le rôle auquel d’aucuns l’ont trop longtemps confiné en tant que « vulgarisateur » de Calvin. Il s’agit d’une évolution historiographique importante qui devrait, nous l’espérons, trouver rapidement son chemin dans les prochaines synthèses sur la diffusion et la réception de la Réforme.

La deuxième contribution consiste à revoir l’image de Viret comme celle d’un réformateur d’intérêt surtout local, soit principalement entre Lausanne et Genève. Or, cette « image stéréotypée » ignore son action réformatrice et sa portée géographique depuis 1541 – date de sa première publication connue (et composée justement, à l’intention des persécutés à l’extérieur du milieu genevois-vaudois, voir l’étude d’Olivier Millet, 23–41) -, jusqu’à sa mort en France peu de temps avant la Saint-Barthélemy. Le réseau pastoral et missionnaire dans lequel s’insère Viret s’étend ainsi de la Suisse actuelle, aux Pays rhénans et à toute la France, avec une attention particulière sur le Midi depuis son arrivée dans le royaume à l’automne 1561. Enfin, le succès de ses nombreux écrits, plusieurs fois édités et traduits en de multiples langues à travers toute l’Europe jusqu’au XVIIe siècle, montre l’étendue de son influence directe et indirecte hors du milieu genevois-vaudois.

Le troisième apport général du livre est la mise en évidence de la variété du corpus littéraire virétien. Tout en appréciant à leur juste valeur les textes satiriques de Viret qui ont élevé ce dernier au rang du deuxième réformateur de langue française le plus apprécié après Calvin, les contributeurs ouvrent la voie à l’exploration de ses autres publications dont la quantité et l’ampleur impressionnent toujours. L’étude systématique de cette opera magna sera désormais facilitée grâce à la bibliographie de Dominique Troilo susmentionnée.

Somme toute, cette publication qui découle d’un important colloque commémoratif remplit bien sa mission, et ce, à plus d’un titre. L’ouvrage enrichit les études virétiennes de connaissances nouvelles et apporte une contribution importante à l’historiographie du réformateur. Il vient modifier des perceptions dominantes et mêmes erronées, tout en ouvrant des pistes de recherche stimulantes et pertinentes. Nul doute que ce volume doit figurer dans la bibliothèque de tous ceux qui s’intéressent au Vaudois et qu’il mérite aussi une belle place dans celle de tout chercheur intéressé, plus largement, par la diffusion et la réception de la Réforme.

René Paquin, Renaissance and Reformation / Renaissance et Réforme, 39.1, Winter / hiver 2016, pp. 160-162
 

Dans Renaissance Quarterly

The eighteen chapters in this volume were contributed by participants in an international colloquium at the University of Lausanne in September 2011, ostensibly the 500th anniversary of the birth of Pierre Viret in Orbe, in the present-day Canton de Vaud, Switzerland. However, the editors suggest that recent scholarship places Viret’s birth in 1509 (the year of John Calvin’s birth) or in early 1510. This edited volume presents the latest scholarship on broadly diverse subjects related to Viret, many never before examined in print. The book is useful for specialists yet comprehensible to university students who might not yet have a reading knowledge of French or English, since the five articles in English and the thirteen in French each contain a synopsis in the other language. The book is broadly divided into two large categories: the theological and literary work of Viret, and the historical and religious context.

The editors emphasize that Viret was no mere appendage to Calvin or a second-rate Reformer, as he has sometimes been treated. Viret was a major Reformer in his own right and an effective preacher. Indeed, Theodore Beza’s correspondence with Viret during the Morely affair of the 1560s attests to the fact that Beza treated Viret as an equal, but one who needed to be apprised of Morely’s faults. Olivier Millet, of the University of Paris-Sorbonne, treats Viret’s extant sermons and homiletics. Lee Wandel, of the University of Wisconsin, examines Viret’s views of the Eucharist and finds Viret closer to Zwingli than Calvin. Christian Moser, of the University of Zurich, examines Viret’s relationship to the Zurich Reformers, especially Bullinger. Carlos Eire, of Yale University, finds Viret ardently opposed to Nicodemism, but Karine Crousaz, from the University of Lausanne and coeditor of this volume, finds Viret more positive toward Islam than to Catholicism at times. Daniela Solfaroli Camillocci, of the University of Geneva and an editor of this volume, examines Viret’s pointed interaction with the Jesuits of Lyon (1563–65). Olivier Labarthe, of the Museum of the History of the Reformation in Geneva, finds Viret an ardent opponent of prayers for the dead in Viret’s debate of 1537 with Pierre Caroli. Frederic Amsler, of the University of Lausanne, examines young Viret’s knowledge of the fathers of the church, and Irena Backus, of the University of Geneva, considers Viret as a historian of the church. Michael Bruening, of Missouri University of Science and Technology, covers Viret’s extant letters, and Jean-François Gilmont looks at Viret’s printers, largely Jean Girard and Jean Rivery, and, when Viret was in Lyon, Claude Ravot and Claude Senneton.

As a historian working in social welfare and the circle of Reformers around Calvin, I found the most intriguing chapters to be Claire Moutengou Barats’s (University of Geneva) on Viret’s participation in a proposition for public assistance in Lausanne (1550), and Philippe Chareyre’s (Universite de Pau et des Pays de l’Adour) on Viret in Bearn (1567–71), where Viret died and was succeeded in his capacity as advisor to Queen Jeanne d’Albret by Nicolas Des Gallars (1571–81). Without being able to describe every chapter, I should not fail to note James Blakeley’s (St. Joseph’s College, New York) on the challenges that Viret, Farel, and the first Reformers had in the territories jointly held by Catholic Fribourg and Protestant Bern.

Topics that were not covered in this volume but are covered elsewhere include the suggestion of Robert Kingdon that Viret left Geneva because Theodore Beza had risen to a place in Geneva that Viret might have wanted for himself, and Viret’s position vis-a-vis Jean Morely, the proponent of democracy in the churches. The editors do not pretend, however, to repeat everything that has been done before but rather to cover topics and material that have been neglected, to give us new insights into Pierre Viret and his work. As such, this sturdy paperbound volume of 423 pages is irreplaceable and is a must for every academic library. It is also so reasonably priced by Editions Antipodes of Lausanne as to be accessible to individual scholars and students as well.

Jeannine E. Olson, Renaissance Quarterly, vol. LXIX, No. 1, Spring 2016, pp. 335-336

Dans la Revue historique vaudoise

Ce n’est vraiment pas de chance: c’est au moment où l’on commémorait le cinquième centenaire de la naissance de Pierre Viret qu’on a découvert qu’il était en réalité né un ou deux ans plus tôt, en 1509 ou 1510!

Mais le colloque tenu à cette occasion en 2011 à l’Université de Lausanne a néanmoins été particulièrement fructueux, car il a permis de donner un nouveau visage à Viret, à travers dix-huit contributions, publiées en français ou en anglais (avec un résumé substantiel dans l’autre langue) et réparties en deux grands ensembles, l’un plutôt consacré à la pensée théologique et au travail littéraire du réformateur, l’autre davantage à son implication dans le développement de la Réforme; mais il est évidemment difficile de séparer ces deux aspects.

Viret passe souvent pour un simple collaborateur de Calvin. Son intervention à Lausanne en 1536 est pourtant moins à analyser en termes de fidélité ou non à la pensée de Calvin (encore assez embryonnaire) que comme la volonté pour un jeune ministre de s’affirmer pleinement. Plusieurs contributions montrent qu’il est bien un réformateur à part entière. Ses sermons sont autant influencés par Erasme et Melanchthon que par Augustin et Calvin. La séparation radicale qu’il fait entre l’esprit et la matière lui fait comprendre la Cène à la manière zwinglienne, comme un simple acte commémoratif. Il est également plus radical que Calvin sur le droit de révolte, qu’il légitime à partir de 1559 dans ses traités contre les nicodémites dans le cas des tyrans et des mauvaises lois. Il se démarque aussi de la sensibilité évangélique française, comme le montre la polémique avec Pierre Caroli sur les prières pour les morts. L’examen de sa correspondance montre qu’il est au centre d’un réseau de pasteurs francophones et le principal contact des pasteurs alémaniques à Lausanne. L’originalité de la pensée de Viret apparaît nettement dans deux communications; l’une sur sa vision de l’islam, moins rejeté qu’instrumentalisé pour mieux réfuter le papisme, l’autre sur sa vision des religions païennes, qu’il utilise surtout pour montrer qu’elles sont finalement plus raisonnables que le papisme.

Sans doute plus que d’autres réformateurs, Viret veut toucher l’homme du commun. Il emploie un langage simple, écrit presque toujours en français, publie des livres de taille réduite auprès d’imprimeurs modestes. La simplicité du style de Viret apparaît également à travers ses références aux Pères de l’Église, utilisés comme informateurs sur divers sujets, et qu’il ne connaît qu’indirectement, sauf pour quelques-uns comme Lactance ou Jean Chrysostome. Mais la recherche de la simplicité passe paradoxalement par une érudition en matière d’animaux pour développer des enseignements moraux.

Viret écrit beaucoup: il vient juste après Calvin dans la production genevoise. La diversité de ses ouvrages est bien mise en valeur, depuis le premier texte entièrement de la main de Viret, l’Épistre consolatoire de 1541 qui, à partir d’arguments bibliques, incite les protestants persécutés à souffrir patiemment. La correspondance a été éditée depuis longtemps, mais M. Bruening a publié récemment 180 nouvelles lettres, qu’il présente ici, en montrant ce qu’elles apportent notamment sur les conflits avec Zébédée, Bolsec et Bauhin. Viret n’a écrit qu’un livre proprement historique, Des Actes des apôtres de Jésus Christ, tentative unique d’écrire une histoire de l’Église catholique du point de vue réformé en n’utilisant pratiquement que des sources catholiques.

Bien d’autres ouvrages sont évoqués à travers les diverses communications, qui donnent un bon aperçu de l’étendue des genres littéraires fréquentés par Viret.

Son action en faveur de la Réforme est évoquée pour plusieurs territoires, notamment dans les bailliages communs de Berne et Fribourg, où on l’accuse de jouer de son influence de manière indue lors des votations religieuses (dans les années 1550). À Lausanne, sa participation à la dispute de 1536, où il joue un rôle décisif dans l’adhésion de la ville à la Réforme est à comprendre comme une manière d’affirmer son autorité ministérielle et donc comme la construction d’une Église s’appuyant sur un corps pastoral institué. C’est à Lausanne qu’il exerce son ministère jusqu’en 1559 et que, dans les années 1550, il instaure l’assistance aux pauvres s’inscrivant dans le mouvement de réforme de l’assistance du XVIe siècle. Lorsqu’il est en opposition avec le Conseil de Berne, il cherche le soutien d’Heinrich Bullinger à Zurich, sans grand succès, même si ce dernier l’aide à développer l’Académie et lui confie les futurs pasteurs zurichois. De Lausanne, Viret se rend à Lyon, après un passage à Genève puis à Nîmes. Là, il multiplie les échanges polémiques par l’imprimé avec les jésuites, notamment Edmond Auger, montrant que désormais seuls les ecclésiastiques des deux camps sont légitimes pour parler de religion. Expulsé de Lyon en 1565, Viret sert différentes communautés en Languedoc, puis passe les dernières années de sa vie, de 1567 à 1571, en Béarn, où Jeanne d’Albret en fait une sorte d’inspecteur ecclésiastique. Mais l’historiographie a curieusement très peu retenu cet épisode, probablement parce que Viret a oeuvré pour le développement de la Réforme, mais sans avoir créé le système presbytéro-synodal du pays ni fondé l’Académie de Lescar-Orthez. Même son lieu de sépulture est inconnu: sans doute à Orthez, mais on ne peut en être sûr.

Ce résumé montre la grande variété des apports du colloque. Toute nouvelle biographie de Viret (la dernière de Dominique-Antonio Troilodate de 2012) se devra d’en tenir compte. Il y a cent soixante ans, l’historien français Michelet écrivait, à propos de la Réforme: « D’elle-même elle était née partout ». Mais pendant bien longtemps, on l’a trop réduite à Luther et Calvin, éventuellement Zwingli. On a désormais de bonnes raisons de souscrire à cette idée d’une naissance multiforme de la Réforme, et de faire de Viret un de ses acteurs majeurs.

Yves Krumenacker, Revue historique vaudoise, 123/2015, pp. 257-258

Dans la revue Zwingliana

Les dix-huit essais qui forment ce volume, proviennent des interventions faites au Colloque International, tenu à l’Université de Lausanne en septembre 2011 à l’occasion du 500e anniversaire de la naissance de Pierre Viret. Dans leur « Introduction », K. Crousaz et D. Solfaroli Camillocci, respectivement des Universités de Lausanne et de Genève, justifient la nécessité et l’utilité de leur entreprise, expliquent l’organisation de l’ouvrage et sa division en deux parties, et présentent brièvement l’objet et le contenu de chaque contribution. Enfin deux index, l’un des noms et l’autre des lieux, en fin du volume en facilitent l’utilisation. Le but était de faire mieux connaître et apprécier l’œuvre du réformateur vaudois. Ces différents spécialistes en histoire, théologie et littérature ont bien atteint leur but, à mon sens, et les éditrices, elles-mêmes contribuant chacune avec un essai, ont admirablement accompli leur tâche. L’ouvrage, donc, est divisé en deux parties parfaitement égales, chacune comportant neuf articles. Or cinq d’entre eux sont en anglais, le reste en français. Ajoutons qu’un copieux résumé dans l’autre langue à la fin de chaque essai rend la consultation de ce livre particulièrement facile. 

La première partie intitulée, « L’Écriture, la tradition et les grands adversaires: aspects de la pensée théologique et du travail littéraire de Viret », est consacrée aux divers écrits du réformateur: théologiques, littéraires et autres. 1) Dans « La Question de la prédication: la théorie homilétique de Pierre Viret et le caractère rhétorique de ses sermons conservés », Olivier Millet rappelle d’abord le fait qu’il ne nous est parvenu que quelques sermons du fameux pasteur et qu’on ne peut, malgré leur qualité stylistique, les considérer encore comme œuvres littéraires à proprement parler. Or l’originalité de Viret se trouverait surtout du côté de la théorie. Il traite en effet d’homilétique, ce qui n’existe pas chez Calvin, par exemple, et cela dans « De la vertu et usage du ministere de la parolle de Dieu, et des sacremens », mais aussi dans « De vero verbi Dei, sacramentorum, et ecclesiae ministerio ». Dans l’ensemble, Millet perçoit l’influence d’Erasme sur le théologien vaudois pour ce qui est de la rhétorique et du style, et celle de Melanchthon en ce qui concerne l’exégèse biblique. 2) Selon Lee Palmer Wandel (« Pierre Viret on the Eucharist »), la critique que fait Viret de la messe, par exemple dans « Des Actes des vrais successeurs de Jésus Christ », n’est pas au fond différente de celle de Calvin, mais sa conception générale de l’eucharistie s’approcherait plutôt de celle de Zwingli – ainsi la cène ne transformerait pas nécessairement celui qui y participe. 3) Que le « nicodémisme » soit une question véritablement théologique ou pas, les écrits de Viret sur ce sujet vont encore plus loin que ceux de Calvin, avance Carlos Eire dans « Pierre Viret and Nicodemism ». Ayant lui-même été persécuté et presque tué par les catholiques, Viret, pense l’historien, était encore mieux placé que Calvin pour parler des « nicodémites ». En tout cas, ilne se contente plus dans certains écrits de la résistance passive, mais suggère même une attitude agressive à l’égard du pouvoir, au cas où celui-ci s’écarterait de l’Ecriture. 4) L’esprit ouvert et relativement tolérant de Viret vis-à-vis des autres religions est bien mis en évidence par Karine Crousaz dans « Pierre Viret et l’Islam ». Déjà Luther et Bullinger, qui désiraient que le Coran fût publié et qu’on le lût, faisaient preuve d’un esprit progressiste, mais leur but était qu’on pût mieux combattre l’ennemi musulman déjà à leurs portes. Viret, ayant moins de préjugés (voir ses « Disputations chrétiennes »), incite plutôt le lecteur à lire les livres sacrés des autres religions, en l’occurrence le Coran, pour mieux les comprendre et, par la comparaison, en venir à une meilleure appréciation de la Bible. De plus, pour lui, l’Islam est une religion à part entière, plus qu’une hérésie chrétienne, ce qui était encore l’opinion de beaucoup de théologiens de son temps. Par ailleurs la mise en parallèle de l’église catholique romaine avec l’Islam et le fait que celui-ci soit même aux yeux de Viret moins dangereux que l’autre, est aussi un point non négligeable de cet essai (voir les « Dialogues du Désordre »). 5) Olivier Pot (« Viret aux origines des sciences religieues: de la mythologie à l’éthnographie ») montre, en analysant les « satires anti-papistes » de Viret (« Du Vrai usage de la salutation faite par l’ange à la Vierge Marie, La Cosmographie infernale », etc.), comment il a malgré lui contribué à la fondation d’une nouvelle science sociale, à savoir « les sciences religieuses ». Précurseur de l’ethnographie, il met en évidence les rapports existant entre le Catholicisme romain et les religions païennes de l’antiquité. L’auteur qualifie enfin la méthode comparatiste du réformateur, dans son étude des religions, de « critique génétique ». 6) A partir d’une analyse des « Actes de la Dispute de Lausanne », des « Disputations chrestiennes » et des « Dialogues du désordre qui est à présent au monde », Frédéric Amsler, dans « Le Jeune Viret et les Pères de l’Église », fait remarquer que le théologien vaudois, qui connaissait d’ailleurs très bien les auteurs païens de l’antiquité, semble moins connaître les Pères de l’Église, surtout ceux qui ont écrit en grec. Etant donné que l’Écriture seule constitue l’autorité pour lui, c’est d’après elle qu’il juge les Pères, ne leur accordant donc qu’une importance relative. 7) Dans « Pierre Viret, historien de l’Église », Irena Backus présente « Des Actes des apostres de Jesus Christ et des apostats de l’Eglise et des successeurs tant des uns que des autres », et en compare les deux éditions de 1554 et 1559. Le mérite de ce volumineux ouvrage de Viret consiste en ce que c’est pour la première fois qu’un réformé rédige une histoire de l’Église, et cela à partir de documents et écrits uniquement d’origine romaine. Son intention est sans doute bonne et pacifique, pense Backus, mais il n’atteint pas vraiment son but, attendu que son attitude de « juste milieu » ne peut satisfaire ni les catholiques, ni les protestants. 8) George Besse (« Une Théologie des lettres divines: Le Cas de l »Epître consolatoire’ de 1541″) explique comment Viret utilise la Bible pour aller au secours spirituel des Vaudois persécutés en Provence et ailleurs. En se basant sur de nombreuses citations de l’Ancien, puis du Nouveau Testament, il montre en quoi consiste la « théologie pratique » du pasteur vaudois pour les « temps de persécution ». En somme, l’ « Epître consolatoire » préconise la Bible comme un vrai « manuel de combat et de vie ». 9) Le dernier article de cette « Première Partie » est de Pierre Dubuis, intitulé « Pierre Viret et sa ménagerie de papier » et consacré à « Metamorphose chrestienne faite par dialogues ». Après avoir rappelé le fait que le recours aux animaux pour évaluer et moraliser l’homme avait existé depuis l’antiquité – on le voit en effet aussi bien dans la Bible que dans la littérature gréco-latine – Dubuis expose le but et la méthode de Viret en analysant tour à tour les deux parties de son livre, à savoir « L’Homme » et « L’eschole des bectes ». La « métamorphose » que propose le réformateur à travers ces dialogues n’est pas comme celles d’Ovide et d’autres auteurs païens, mais bien une « métamorphose chrétienne » et édifiante. 

La deuxième partie, intitulée « Viret réformateur, de l’espace romand à la France: action, réseaux et contextes religieux », porte sur les activités de Pierre Viret en tant que pasteur et missionnaire, plus précisément la place qu’il occupe dans la diffusion de la théologie réformée. 1) Michael W. Bruening résume, dans « Pierre Viret’s Epistolary Life and Corpus », les résultats d’une édition critique de la correspondance inédite du réformateur qu’il a publiée en 2012 chez Droz. Il tire quelques conclusions sur le contenu de ces lettres, lesquelles nous éclairent aussi bien sur les idées que sur la vie de Viret. Dans un appendice à la fin de ce même article, il mentionne plusieurs autres lettres qu’il a découvertes après la publication de son livre, et en reproduit une. Enfin Bruening considère Viret comme un théologien et pasteur important de langue française au niveau européen, et non un simple disciple de Calvin, comme on a parfois tendance à le croire. 2) Les rapports de Viret avec ses imprimeurs font l’objet principal de l’article de Jean-François Gilmont, « Pierre Viret et ses imprimeurs ». Il y est aussi question de la vie matérielle, souvent difficile, et du travail des différents imprimeurs chez qui Viret publia ses ouvrages. Ses principaux imprimeurs sont Jean Girard, avec qui le théologien s’entend très bien, puis Jean Rivery, le successeur de Girard. D’autres imprimeurs, y compris français, sont aussi mentionnés dans cet article. Enfin, Gilmont fait remarquer qu’après Calvin, c’est bien Viret qui était le théologien le plus publié à Genève. 3) Les difficultés rencontrées par les pasteurs réformés comme Viret du côté de l’ouest, par exemple dans un endroit comme Goumoëns, qui dépendait depuis longtemps à la fois de Berne (réformée) et de Fribourg (catholique), et où les deux confessions catholique et protestante étaient également pratiquées, sont traitées par James J. Blakeley dans « Neither Catholic nor Reformed: the Challenges faced by Pierre Viret, Guillaume Farel, and the first Reformers in the jointly held Territories ». Des deux côtés, en fait, on pouvait constater des actes ou propos agressifs, non seulement pour des raisons religieuses, mais aussi politiques. 4) Geneviève Gross s’est penchée, quant à elle, sur le rôle important joué par Viret dans la fameuse « Dispute de Lausanne » (1536). Dans « Du Prédicant de la ‘Dispute de Lausanne’ au rédacteur des ‘Actes’: Pierre Viret et la construction du ministère pastoral comme figure d’autorité (1536-1548) », elle montre l’originalité de Viret avant l’arrivée de Calvin à Genève, et sa grande capacité, notamment à l’occasion des « Actes » où il joua un rôle considérable, à défendre sa propre théologie basée uniquement sur l’Ecriture et concernant le rôle du pasteur. Les « Actes de la Dispute », qui furent rédigés par Viret à la demande des autorités bernoises, ont pu, selon Gross, aider à résoudre les conflits existant entre Berne et Lausanne. 5) Le conflit qui surgit entre Viret et Pierre Caroli, nommé dirigeant de l’Église réformée de Lausanne en 1536, à propos de la prière pour les morts que le Français avait décidé d’introduire arbitrairement, est bien analysé par Olivier Labarthe dans son essai, « Faut-il prier pour les morts? Un débat de pastorale entre Viret et Caroli ». Or la position à demi-catholique de Caroli sur cette question théologique concernant les fins dernières fut judicieusement attaquée par Viret, lequel y percevait un retour progressif vers la doctrine du purgatoire et la remise en question de la justification par la foi seule. Le pasteur vaudois sortit vainqueur de ce débat, tout en étant soutenu par Calvin, Farel, et d’autres. Enfin, il continua à travers d’autres écrits au cours des années suivantes à réfuter vigoureusement la théorie de Caroli, influencé sans doute par Wessel Gansfort. 6) L’étude de Claire Moutengou Barats, « L’Influence de Pierre Viret dans une proposition d’assistance publique à Lausanne, l’Ordonnance des Pauvres de 1550 », est consacrée aux activités de Viret concernant la pauvreté. Elle y analyse l’Ordonnance de 1550, publiée par Bernard de Cérenville en 1916, et démontre la sincérité et la pensée véritablement charitable de Viret à l’égard des pauvres. Les problèmes soulevés comprennent les définitions de la pauvreté et de la charité, la question des « œuvres », mal comprise selon Viret par l’Église traditionnelle et toujours plus ou moins pratiquée à Lausanne, la redistribution des richesses, la gestion des biens de l’Église, l’importance qui devrait être donnée aux magistrats en cette matière, de même que la question de la « répression », guère pratiquée à Lausanne. 7) Christian Moser, dans son article intitulé « A Dissonant Alliance: Viret and the Zurich Reformers », étudie les rapports de Viret avec les réformateurs zurichois, en particulier avec Bullinger. Que le théologien vaudois ne séjournât jamais à Zurich, et qu’il n’écrivît que très rarement à Bullinger et Gwalther, est une question plus complexe qu’elle ne le semble a priori. Ainsi, à travers les lettres qu’il analyse, en se focalisant sur les thèmes de la discipline ecclésiastique, l’abrogation des Colloques de 1549, et l’Affaire Bauhin (1565), Moser met en évidence certaines divergences d’opinion qui existaient entre Viret et Bullinger. Par exemple, alors que le leader de Lausanne cherchait des alliés à Zurich qui l’auraient soutenu dans ses conflits avec Berne, Bullinger, qui pensait plus à l’unification religieuse de la Suisse, ne pouvait le satisfaire sur ce dernier point, mais ilfut bien de son côté dans l’Affaire Bauhin. 8) Grâce à Daniela Solfaroli Camillo (« Pédagogies en combat: Pierre Viret et les Jésuites à Lyon »), nous nous rendons mieux compte des difficultés rencontrées par Viret lors de son deuxième séjour à Lyon en 1563-65, une période durant laquelle les Catholiques sont redevenus forts dans cette ville. Cet article illustre « le lien entre l’activité littéraire » du réformateur et ses « stratégies confessionnelles ». Il s’agit de montrer comment, à travers ses écrits polémiques, Viret défendit la cause réformée à Lyon, toujours en se basant sur l’Ecriture, et comment il fit face à ses adversaires, en particulier E. Auger, jésuite agressif, par exemple autour de la question de l’autorité. Comme les catholiques étaient politiquement avantagés, la tâche du pasteur était bien difficile. Bref, l’étude des écrits polémiques des deux camps nous apprend beaucoup sur leurs procédés et buts, tout en montrant l’importance et l’influence de la Réforme à Lyon. 9) Cet ouvrage se termine, ce qui semble logique, par l’article de Philippe Chareyre, « L’Héritage de Pierre Viret en Béarn », puisque c’est là que le théologien et pasteur suisse passa ses dernières années. Alors qu’il y fut très actif, pourquoi l’a-t-on oublié dans cette région? Le fait qu’il était étranger, ou qu’il entretenait des « relations privilégiées » avec la reine de Navarre, pourraient en partie expliquer cette attitude négative des historiographes, déjà à la fin du XVIe siècle. Chareyre cite des passages de plusieurs ouvrages des siècles suivants sur l’histoire du protestantisme en Béarn, et met en évidence le fait que Viret a été soit sous-estimé, soit complètement ignoré. Il faut attendre la deuxième moitié du XXe siècle pour qu’enfin il soit réhabilité. L’auteur mentionne deux autres raisons pour expliquer l’oubli de Viret: d’abord, quand il arriva en Béarn, la Réforme y était déjà bien installée; ensuite, sa mort prématurée ne lui a pas donné le temps de se faire apprécier à sa juste valeur. Cet article est suivi de neuf annexes, y compris le dernier testament de Viret et son portrait gravé. 

Cet ouvrage, riche et informatif, mais aussi bien organisé et bien présenté, rendra certes un grand service non seulement à ceux qui s’intéressent à Pierre Viret, mais à tous les étudiants et spécialistes de la Réforme. 

John H. Mazaheri, Zwingliana, N42/2015, pp. 288-294

Dans The Catholic Historical Review

Although hardly forgotten, Pierre Viret is among the less appreciated early leaders of the Reformed movement. Born in the Pays de Vaud around 1511, he studied at Paris before returning to his native land. After a short-lived, turbulent stint ministering in and around the Vaud, he joined Guillaume Farel at Geneva in 1534 and two years later moved to Lausanne where he assisted in that city’s reform and eventually became chief pastor. Viret remained at Lausanne until 1559. Then, following a bitter quarrel with the municipal magistrates over control of church discipline, he moved briefly to Geneva before going to southern France. He served churches at Lyon, Nîmes, and Pau during the decisive decade of the 1560s, dying at Pau in 1571.

The collection of eighteen essays at hand had its origins in a conference held at Lausanne in 2011 to celebrate the 500th anniversary of Viret’s birth. The editors and contributors, whose ranks include both established and younger scholars, seek to revise approaches to and appreciation of Viret along three principal axes. To begin, Viret ought to be valued as a reformer in his own right and not simply as a popularizer of John Calvin’s understandings. Second, Viret was an international figure; his interests and activities reached well beyond local Swiss cantons. Finally, Viret was a prolific author whose entire oeuvre – not merely one or two works – warrants close study. The present volume’s re-evaluation of these issues divides roughly into two parts. The first nine chapters consider Viret’s theological views and literary output; the remainder examines his reforming endeavors in the Swiss and French orbits.

Olivier Millet opens the discussion with an illuminating essay on Viret’s surviving sermons and his writings on homiletics. Lee Palmer Wandel follows with a close analysis of his distinctive conceptualization of the Eucharist. The crucial issues surrounding Viret’s anti-Nicodemism and his advocacy of resistance to the tyrant are the subject of Carlos Eire’s chapter. Reaching beyond Christian circles, Karine Crousaz – one of the volume’s coeditors – elaborates upon Viret’s unique views on Islam and the Turks. The role of Viret as church historian is the subject of essays by Olivier Pot, Frédéric Amsler, and Irena Backus. This section concludes with chapters by George Besse on Viret’s first spiritual writings and by Pierre Dubuis on his comparison of the nature of animals with human behavioral traits.

The next nine essays begin with Michael Bruening’s perceptive observations on the new information that has emerged from his recent edition of Viret’s previously unpublished letters. Continuing in this vein, Jean-François Gilmont details Viret’s relationship with his publishers. A wonderful portrait of Viret as pastor, preacher, and public disputant emerges from the essays of James J. Blackeley, Geneviève Gross, and Olivier Laberthe. Claire Mountengou Barats explores Viret’s views and accomplishments in the realm of social welfare, whereas Christian Moser offers a close reading of his epistolary exchange with the Zurich reformer Heinrich Bullinger. Finally, collection coeditor Daniela Salfaroli Camillocci and Philippe Chareyre propose fresh insights into Viret’s time at Lyon and in Béarn.

Altogether, these contributions on Viret as theologian and controversialist, preacher and pastoral organizer help better locate him in the age of the Reformation. They correct some mischaracterizations by earlier scholars, establish Viret as an historical figure eminently worthy of study, and suggest future possibilities for the advance of our knowledge of this largely unheralded figure.

Raymond A. Mentzer, The Catholic Historical Review, vol. 101, no. 3, 2015, pp. 651-652

Dans Studies in Religion/Sciences religieuses

Il est probable que le recenseur a d’autant plus apprécié la lecture de cet ouvrage collectif que Pierre Viret est à la fois son compatriote et son coreligionnaire. À quelques siècles de distance, il est vrai. Mais, nonobstant ces affinités particulières, il n’est pas nécessaire d’être suisse et protestant pour apprécier le livre. Car il présente un personnage important dans l’histoire de la Réformation, mais peu étudié, probablement parce qu’on l’a souvent simplement considéré comme le « vulgarisateur de Calvin ».

Concrètement, l’ouvrage publie les actes d’un colloque organisé par les Universités de Lausanne et de Geneève en 2011, à l’occasion du 500ème anniversaire de la naissance de Pierre Viret. Organisé en deux parties, la première portant sur « les aspects de la pensée théologique et du travail littéraire de Viret » et la seconde sur l’action, les réseaux et les contextes religieux de « Viret réformateur » en Suisse romande d’abord, en France ensuite, il rassemble 18 contributions (dont cinq en anglais) portant sur différents aspects de la vie et de l’oeuvre du réformateur suisse romand. Elles sont précédées d’une introduction et suivies d’un double index des noms et des lieux.

Les éditrices soulignent trois aspects novateurs de l’ouvrage: contredisant l’image du  » réformateur mineur », il « permet d’aborder désormais Viret comme réformateur à part entière » (9); contredisant l’image d’un « réformateur d’intérêt essentiellement local », il montre que l’ampleur et le rayonnement de « l’action réformatrice de Viret » va « bien au-delà de l’espace romand » (11); il met encore en évidence « la variété des écrits de Viret » (12).

Le recenseur a d’abord été frappé par la cohérence de l’ouvrage et la complémentarité des articles, ce qui n’est pas toujours le cas dans les ouvrages collectifs. Il a ensuite découvert l’originalité de la pensée et de l’action de Viret (quelques exemples: Karine Crousaz aborde la manière dont Viret traite de l’islam; Olivier Pot en fait un précurseur des sciences religieuses; Pierre Dubuis montre comment il utilise des métaphores animales pour illustrer son message; James J. Blakeley examine le rôle de Viret là où catholiques et protestants ont pu cohabiter un certain temps; Claire Moutengou Barats montre comment Viret a participé à instaurer une « assistance publique » à Lausanne). Enfin, et évidemment, il a découvert les options théologiques de Viret sur la prédication (Olivier Millet) et la Cène (Lee PalmerWandel) et plus largement les particularités de la Réforme suisse romande (celle de Viret, Farel et Calvin notamment) par rapport et même contre la Réforme suisse allemande (celle de Zwingli et Bullinger principalement).

Le recenseur n’a qu’un seul regret, que les auteur-e-s ne soient pas mieux situés. Il faudrait connaître tou-te-s les auteur-e-s pour savoir qui est historien-ne, qui est théologien-ne, etc. Mais comme lui, vous saurez chercher leur biographie sur Internet.

Olivier Bauer, Studies in Religion/Sciences Religieuses, 44(2) pp. 276-277

Dans Évangile et liberté

Depuis le XIXe siècle, on a trop souvent présenté le réformateur Pierre Viret comme un épigone de Calvin, son nom ne figurant même pas sur le Mur des Réformateurs à Genève. Le 500e anniversaire de sa naissance, en 2011, a permis de réviser fondamentalement ce jugement dépréciateur. Les actes d’un colloque tenu à cette occasion le montrent à l’envi. O. Millet met par exemple en évidence l’originalité de son homilétique par rapport à celle de Calvin; L. P. Wandel la parenté de sa conception de la cène avec celle de Zwingli; K. Crousaz son interprétation originale de l’islam; M.W. Bruening l’ampleur de son influence sur la Réforme d’expression française; D. Solfaroli Camillocci les débats de Viret avec les jésuites de Lyon; Ph. Chareyre l’importance et la nature de sa contribution à la Réforme en Béarn… Une partie des exposés est en anglais, mais chaque fois avec un très bon résumé en français. Ce volume accessible à un large lectorat est une contribution de poids à un aspect trop méconnu de la Réforme francophone.

Bernard Reymond, Évangile et liberté, No. 280, juin-juillet 2014, p. 22