Religieux, société civile, politique

Enjeux et débats historiques et contemporains

Ehrenfreund, Jacques, Gisel, Pierre,

2012, 329 pages, 27 €, ISBN:978-2-88901-078-3

La question religieuse revient au cœur de nos sociétés sécularisées qui ne savent pas bien comment y faire face ni même comment l’interpréter, après qu’on a pensé pouvoir la renvoyer à la seule dimension privée de la conviction subjective.
Pluralité de traditions dans la manière d’organiser le vivre-ensemble; désinstitutionnalisation des traditions héritées; nouvelles affirmations identitaires; sectes et nouveaux mouvements religieux; religiosité diffuse, voire spiritualités athées: toutes ces réalités valent comme symptôme de ce qui arrive à nos sociétés. Cet ouvrage réunit historiens, politologues, sociologues, anthropologues et philosophes autour des choix que les sociétés doivent faire, sur le plan de l’école, de l’espace public, des rythmes, des symbolisations et des ritualités, de l’articulation au bien commun et à l’état de droit.

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Description

La question religieuse revient au cœur de nos sociétés sécularisées qui ne savent pas bien comment y faire face ni même comment l’interpréter, après qu’on a pensé pouvoir la renvoyer à la seule dimension privée de la conviction subjective.
Pluralité de traditions dans la manière d’organiser le vivre-ensemble; désinstitutionnalisation des traditions héritées; nouvelles affirmations identitaires ; sectes et nouveaux mouvements religieux; religiosité diffuse, voire spiritualités athées: toutes ces réalités valent comme symptôme de ce qui arrive à nos sociétés. Et à quoi ces sociétés doivent faire face, sur le plan de l’école, de l’espace public, des rythmes, des symbolisations et des ritualités, de l’articulation au bien commun et à l’état de droit.
Le présent ouvrage est né d’un colloque de l’Institut Religions, Cultures, Modernité de la Faculté de théologie et de sciences des religions de l’Université de Lausanne, où ont été invités à s’exprimer des historiens, des politologues, des sociologues, des anthropologues, des philosophes. 
Y sont présentés et interrogés des données historiques sur quatre siècles de modernité européenne, diverses réalités extra-européennes (pays arabes, Afrique, Israël, Inde…), de nouveaux types de positionnement des acteurs contemporains (créationnistes étasuniens, reprises et transcriptions venant de la gauche radicale…).

Table des matières

I. Religion et conflit dans l’Europe de la première modernité: la société aux prises avec la diversité religieuse 

  • Mise en perspective (Pierre Gisel)
  • Communauté, conscience, confession. L’épreuve du choix confessionnel au XVIe siècle en Suisse romande (Olivier Christin)
  • Tolérance ou coexistence? Les régulations pragmatiques du conflit confessionnel à l’époque moderne (Christian Grosse)

II.  Organiser une suprématie du politique sur le religieux: statut et fonction impartis au religieux. Les XIXe et XXe siècles français: émancipation et redistribution 

  • Mise en perspective (Jacques Ehrenfreund)
  • L’école et la religion. Un parcours de la laïcité française (Philippe Portier)
  • La reconnaissance des « cultes reconnus ». Une pluralité acclimatée par l’État (Rita Hermon-Belot)
  • Voile et burqa en France. Deux lois d’interdiction aux sens différents (Patrick Weil)

III. Processus politiques et religieux à l’oeuvre dans le contemporain extra-européen 

  • Mise en perspective (Jacques Ehrenfreund)
  • Les révolutions arabes et le Mouvement vert en Iran. La nouvelle religiosité et le nouveau modèle politique (Farhad Khosrokhavar)
  • Le religieux et le politique en Afrique musulmane francophone. Une pratique souple de la laïcité
en Côte d’Ivoire et au Sénégal (Monika Salzbrunn)
  • « État juif et démocratique ». Mise en perspective d’un débat israélien contemporain (Jacques Ehrenfreund)
  • Les « religions autochtones/indigènes ». Histoire critique et contexte d’énonciation: un éclairage indien (Raphaël Rousselau)
  • Transformer la société civile? Religions, politique de l’anthropologie et utopie de la comparaison
dans les Patterns of Culture de Ruth Benedict (Christian Indermuhle)

IV. Débats sur le statut du religieux en modernité tardive et interrogations sur la société civile et le politique 

  • Mise en perspective (Pierre Gisel)
  • Islam, religion et sécularité (Reinhard Schulze)
  • Politiser les évangéliques par le « mandat culturel ». Sources, usages et effets de la théologie politique de la Droite chrétienne américaine (Philippe Gonzalez et Joan Stavo-Debauge)
  • La postérité de la Théologie politique chez Giorgio Agamben et Daniel Bensaïd. Ou le retour du refoulé religieux dans les contestations théorico-politiques de la mondialisation libérale (Tristan Storme)
  • De quoi le retour du motif religieux est-il le nom? (Pierre Gisel)

Presse

Dans la Revue d’histoire et de philosophie religieuses

Cet ouvrage collectif est le fruit d’une réflexion du (nouvel) Institut
Religions, Cultures, Modernité, de la Faculté de théologie et de science des religions de l’Université de Lausanne. La plupart des contributeurs sont des historiens et sociologues des religions. Les centres de recherche parisiens sur religion et sociétés (EHESS, EPHE, CNRS) sont à l’honneur, avec 8 contributeurs sur 15.

Les perspectives étudiées sont à la fois diachroniques et synchroniques, et touchent à plusieurs religions et plusieurs positionnements religieux dans différentes sociétés. L’approche est donc résolument interculturelle et interreligieuse. On se demandera si une telle ouverture ne nuit pas à la pertinence d’une pensée qui cherche à aborder un religieux multiforme, présent partout.

La première partie est à teneur historique, qui traite du religieux dans la « première modernité ». La deuxième s’intéresse aux relations (ou conflits) entre le religieux et le politique en France, aux XIXe et XXe  siècles. Trois articles sont à signaler: « L’école et la religion. Un parcours de la laïcité française », « La reconnaissance des ‘cultes reconnus' » par Napoléon et, plus en phase avec l’actualité, « Voile et burqa en France ». La troisième partie est consacrée au religieux extra-européen, avec des articles sur les révolutions arabes, le rapport entre religieux et politique en Afrique musulmane francophone, l’État juif démocratique, auxquels s’ajoute un éclairage indien sur les religions autochtone et indigènes. Une dernière partie est relative à des phénomènes plus occidentaux, considérés par les éditeurs comme l’expression de la « modernité tardive », et qui concernent la théologie politique de la droite américaine ou le retour du refoulé religieux dans les contestations théorico-politiques de la mondialisation libérale.

Jérôme Cottin, Revue d’histoire et de philosophie religieuses, tome 94, n° 1, 2014, p. 121

Dans la revue Studies in Religion / Sciences Religieuses 

Cet ouvrage collectif est le prolongement d’un colloque tenu à l’Université de Lausanne (UNIL) en 2011. Jacques Ehrenfreund (professeur d’histoire des Juifs et du judaïsme à l’UNIL) et Pierre Gisel (professeur d’histoire des théologies, des institutions et des imaginaires chrétiens à l’UNIL) y ont rassemblé et fort bien organisé les réflexions des meilleur-e-s spécialistes lausannois et parisiens (ainsi que de quelques autres) sur un sujet ô combien d’actualité.

Dans la première partie « Religion et conflit dans l’Europe de la première modernité »: la société aux prises avec la diversité religieuse », Olivier Christin (professeur d’histoire moderne à l’Université de Neuchâtel) remet en cause la valeur effective d’un principe que l’on pensait bien établi au XVIe  siècle, celui du « cujus regio, eius religio »; Christian Grosse (professeur d’histoire et d’anthropologie des christianismes modernes à l’UNIL) réévalue la manière dont, un siècle plus tard, catholiques et protestants ont su coexister tout en se démarquant.

Dans la seconde partie « Organiser une suprématie du politique sur le religieux: statut et fonction impartis au religieux. Les XIXe et XXe siècles français: émancipation et redistribution », Philippe Portier (directeur d’études à l’EPHE à Paris), Rita Hemon-Blot (historienne et maître de conférence à l’EHESS à Paris) et Patrick Weil (directeur de recherche au CNRS) répondent à trois questions énoncées par Jacques Ehrenfreund: « La France a-t-elle constitué un modèle dans la manière de séparer le religieux du politique? La laïcité, telle que mise en place par la loi de 1905, est-elle la modalité la plus aboutie pour faire cohabiter ensemble des populations n’adhérant pas aux mêmes croyances ou affirmant leur droit à n’en avoir pas? Est-elle encore efficace aujourd’hui pour gérer le ‘vivre-ensemble’ ou s’est-elle lentement transformé pour devenir une pomme de discorde? » (49).

Dans la troisième partie « Processus politiques et religieux à l’oeuvre dans le contemporain extra-européen », Farhad Khosrokhavar (directeur d’études à l’EHESS à Paris) traite des « révolutions arabes et [du] Mouvement vert en Iran », Monika Salzbrunn (professeure de Religions, migration, diasporas à l’UNIL) aborde « le religieux et le politique en Afrique musulmane francophone », Jacques Ehrenfreund discute la légitimité de la prétention de l’État israélien à être à la fois « Juif et démocratique », Raphaël Rousseleau (professeur d’histoire et anthropologie des processus politico-religieux à l’UNIL) propose un double « éclairage indien » venu d’Inde et d’Amérique du Nord, enfin Christian Indermuhle (premier assistant du programme Mondes virtuels, imaginaires culturels, religions pour l’EPFL à l’UNIL) présente la place des « religions, [de la] politique de l’anthropologie et [de l’]utopie de la comparaison dans les Patterns of Culture de Ruth Benedict ».

Dans la quatrième partie « Débats sur le statut du religieux en modernité tardive et interrogations sur la société civile et politique », Reinhard Schulze (professeur d’Études islamiques et de philologie orientale à l’Université de Berne) complexifie la manière dont l’islam pense la religion et la sécularisation, Philippe Gonzalez (maître assistant à la Faculté des sciences sociales et politiques de l’UNIL) et Joan Stavo-Debauge (chargé de recherche à la Faculté de sciences sociales et politiques de l’UNIL) mettent en évidence la manière dont les évangéliques étasuniens refusent la sécularisation et cherchent à imposer leur vision chrétienne du monde, Tristan Storme (chercheur au Centre de théorie politique de l’Université libre de Bruxelles) rappelle comment la Théologie politique du juriste catholique Carl Schmitt traite de la sécularité et de la sécularisation, et Pierre Gisel conclut l’ouvrage en se demandant « De quoi le motif du retour du religieux est-il le nom? » Si la réponse vous intéresse, il vous suffit de lire le livre!

Olivier Bauer, Studies in Religion / Sciences Religieuses, No. 43-1, 2014, p. 194-195