Les mains glacées

Adatte Marie-Morgane,

ISBN: 978-2-88901-212-1, 2021, 88 pages, 24€

Bande dessinée « reportage », Les mains glacées donne une vision sensible du milieu marin polaire et de la fragilité de son éco-système. De retour d’une résidence le long des côtes du Groenland sur le voilier Knut de l’association MaréeMotrice, MarieMo élabore cette série de petits sketches magnifiquement illustrés à l’encre de chine. Mélanges entre réalité et imaginaire marin, ils dévoilent un certain regard sur les aléas d’un continent en proie au réchauffement climatique. Un dialogue entre l’océan, la glace, la faune et l’illustratrice.

Format Imprimé - 30,00 CHF

Description

Le p’tit mot en plus … 

  • Déjà plusieurs expositions ont vu le jour autour de ce projet d’exploration et du carnet de bord de Mariemo : une installation «Iceberg » lors de l’exposition « Pôles, feu la glace » au Muséum d’histoire naturelle de Neuchâtel, une exposition et une lecture-projection dans le cadre du printemps culturel « Grand Nord » à Neuchâtel, ainsi qu’une exposition à Delémont’BD en 2019.
  • En 2021, l’autrice expose et dédicace les 25 et 26 septembre à Tramlabulle (festival de BD à Tramelan, BE).
  • Une exposition a eu lieu le 3 octobre à la Ferme du Grand-cachot-de-vent (JU).
  • Vernissage du livre au bar de l’Univers à Neuchâtel, jeudi 7 octobre à 18h.

 

Extraits des planches

©MarieMo

Presse

Lu et partagé !

De retour d’une résidence sur le Knut, un voilier faisant halte au Groenland, MarieMo présente ses carnets de voyages. Entre les premiers temps de découverte de la navigation et la nature extraordinaire qu’elle découvre sur place, c’est aussi le portrait des bouleversements que vit cette contrée qui est dressé dans cet album. Par petits récits et anecdotes, on saisit toute la complexité de ce qui se trame dans le grand Nord. D’une qualité graphique exceptionnelle quand elle dresse le portrait de la faune locale, MarieMo surprend néanmoins par des épisodes de dessin plus fugaces pris sur le vif. Le propos et le graphisme y sont complémentaires et remarquablement exécutés. Si le thème est dur, il n’en reste pas moins abordable pour les lecteurs du début de l’adolescence. La thématique et l’urgence s’y ressentent et il s’avère que cette lecture donnerait beaucoup à réfléchir aux futures générations.

Article de Clément Fourrey dans le deuxième numéro de Lu et partagé !

Dans la Revue Silence

Ce journal de bord illustré relate le mois passe sur le Knut, un voilier qui emmène l’autrice du nord au sud du Groenland. L’humour et la poésie traversent la BD pour décrire et représenter avec sensibilité animaux, icebergs, vagues, villages et paysages découverts au fil du voyage. Les mains glacées nous embarque à la découverte de ces terres froides, souvent fantasmées ou idéalisées, offrant un regard immersif et contemporain sur l’état du milieu polaire. QB

Article dans la Revue Silence n°509, Avril 2022

 

«CHAQUE ICEBERG EST UN PERSONNAGE»

La Neuchâteloise Marie-Morgane Adatte publie sa première BD intitulée «Les mains glacées», une plongée dans l’Arctique et le réchauffement climatique

portrait MarieMo
© Thierry Porchet

 

Son voyage au Groenland lui était prédestiné. Marie-Morgane Adatte aime l’hiver, la montagne, la nature, les cailloux et les gens. Elle a besoin d’un cadre pour travailler: un temps donné, un espace. Rien de mieux qu’un voilier donc. Et elle est particulièrement attirée par les pays du Nord, même si son père géologue emmenait parfois sa fa-mille dans le sud, en Bulgarie, en Italie, en Grèce, en Espagne, au Mexique, au Maroc… «Je me souviens de marches dans le désert à la recherche de fossiles, tout en remplissant des sacs de cailloux», raconte-t-elle. Lors de ces périples, la petite fille dessine déjà. «J’ai très tôt adoré le format du carnet de bord», explique celle que ses proches appellent Marie-Mo,  devenu plus tard son nom d’artiste (sans tiret). «Je devais avoir 7 ans, et je me sou-viens très bien, alors que je dessinais l’orque Willy (!), avoir entendu ma tante artiste me prédire l’entrée dans une école d’art!» Elle choisira, en effet, quelques an-nées plus tard, celle de Bienne, le graphisme en spécialisation. 

Quant à la navigation, l’enfant du village d’Enges sortait de temps en temps avec le bateau de sa tante et des amis sur le lac de Neuchâtel. Se laissant flot-ter sans jamais vraiment s’intéresser aux techniques marines. La voile, elle en apprendra donc les rudiments sur la côte ouest du Groenland.

LA FONTE DES GLACES

En été 2018, elle embarque, avec trois autres artistes, sur le voilier de l’association MaréMotrice – un nom qui fait étrangement écho au sien. Celle-ci pro-pose des expéditions polaires pour documenter, autrement que scientifique-ment, la mutation du pôle Nord en proie au réchauffement climatique. Un voyage comme une initiation. «C’était tellement beau et incroyable à chaque instant, que je me suis sentie comme un nouveau-né», témoigne MarieMo. Sa conscience écologique se renforce au fil des jours. «On voit littéralement la glace fondre, les glaciers se déplacer. Et on les entend! Chaque iceberg est un personnage. Cela chamboule d’en voir un se re-tourner sur lui-même plusieurs fois en quête d’un nouvel équilibre.» MarieMo s’immerge dans cette nature sauvage tout en vivant avec cinq autres personnes sur un voilier de quinze mètres de long. Une proximité dans l’immensité. «Dès qu’on accostait quelques heures, chacun partait dans une autre direction», sourit-elle. Tout en précisant avoir beaucoup aimé ses compagnons de vagues. «J’adorais être au coin du poêle, confiné dans un petit espace. L’ambiance était celle d’un chalet. Cela me rappelait les camps de ski», souligne la monitrice de sport d’hiver. Chaque soir, la lecture d’extraits de Moby- Dick, par un metteur en scène embarqué lui aussi dans cette aventure, l’en-chante; tout comme l’odeur du café le matin, l’utilisation d’une perceuse bricolée pour faire mousser le lait, ou en-core d’une théière d’eau froide et une autre d’eau chaude pour toute douche. Si son rêve d’enfant de voir un morse sera déçu, MarieMo tombera amoureuse des phoques, «si curieux et agiles dans l’eau, et si maladroits quand ils en sortent». Regarder l’horizon, apercevoir des baleines, scruter les plaques de glace dans le brouillard, marcher sur le continent à la recherche de cailloux (encore et toujours), et surtout écrire et dessiner, malgré le froid. «On était en été, donc ça allait», tempère l’adepte de bains lacustres hivernaux. Une habitude qu’elle quittera, étrangement, à son retour du Grand Nord.

Chaque jour, la dessinatrice remplit son carnet de bord avec son stylo très fin qu’elle abreuve d’encre de Chine. «Je m’exerce à la couleur, mais je n’y arrive pas encore», explique la férue de noir et blanc. Quant aux textes, la bédéiste- reporter privilégie le piquant, flirtant avec le sarcasme, et évite les pensées trop gentilles ou moralistes. Sa première BD personnelle Les mains glacées – un titre qu’elle avait déjà en tête avant de partir – vient d’être publiée. Elle retrace ce voyage, entre réalité et imaginaire, qui a transformé sa créatrice.

Celle-ci rêve d’ailleurs de repartir en mer, mais cette fois à bord d’un navire de sauvetage en Méditerranée. «La migration me touche beaucoup. J’ai envie de pouvoir retranscrire des témoignages des personnes qui ont fui leur pays et de celles qui les sauvent. A travers mon travail, j’ai besoin de faire passer des mes-sages sur des causes qui me touchent.» Le climat, l’exil, l’égalité des droits…

LE 9e ART AU FÉMININ

Depuis sa résidence d’artiste au festival de BD à Delémont en 2017, MarieMo fait partie du collectif féministe La bûche, et participe activement au fanzine alternatif du même nom. Dernièrement, elle a contribué à son hors-série Les voix qui retrace la lutte des femmes en Suisse pour le droit de vote. Très admirative de ces révolutionnaires, l’autrice prône l’égalité, sans se sentir foncièrement féministe. Elle estime être entrée dans le monde du 9e art sans trop de difficulté, au moment où les femmes commencent à y trouver une place. En 2020, MarieMo – qui travaille beaucoup pour des musées et autres institutions culturelles, et adore sortir dans des cafés sympas – vit très mal les répercussions de la pandémie. «J’en ai bavé, résume-t-elle, financièrement, professionnellement, socialement.» En comparaison, 2022 sonne comme un renouveau pour l’illustratrice et graphiste qui se sent, depuis peu, prête à endosser le statut d’autrice de bandes dessinées. Elle vient de s’installer dans un atelier collectif, et d’emménager dans un nouvel appartement en colocation avec des amis. Sa première BD, Les mains glacées, a été récemment publiée, et en augure bien d’autres. D’ailleurs, elle a déjà les titres.


Aline Andrey, L’événement syndical, 2 février 2022

Dans le 24H…

Passer une résidence d’un mois sur Knut, un voilier mois sur d’exploration de 15 mètres, dans les régions polaires, c’est ce que propose MaréMotrice à des artistes d’ici et d’ailleurs. La Biennoise MarieMo a ainsi touché l’ouest du Groenland en 2018. La «bédéaste idéaliste» y a trouvé de quoi alimenter son œuvre engagée pour la sauvegarde de la nature. Après plusieurs expositions, «Les mains glacées» sort en album dans une succession de croquis, de courtes planches un peu impressionnistes. La poésie y règne, l’humour y fait des apparitions délicates, et l’ensemble dégage une nostalgie d’un monde qui s’abîme. On sent la rudesse du climat, la lumière incroyable qui éclaire ces glaces, et la présence humaine qui y laisse sa trace. Et MarieMo n’y verra donc jamais ces morses qu’elle espérait tant voir.


David Moginier, 24Heures, 16/17 octobre 2021

 

Portrait
MARIE-MORGANE ADATTE GRAPHISTE ET ILLUSTRATRICE

Graphiste indépendante, Marie-Morgane Adatte travaille souvent main dans la main avec le milieu culturel de la région. Affiches de soirées, de concerts, de musée, d’exposition, pochettes de disques … Mais avec le Covid, on s’en doute, «c’est devenu le néant au
niveau des projets culturels». La Neuchâteloise a dû passer trois mois sans gagner de véritable salaire avec son activité principale. «Mes parents m’ont un peu aidée, et puis
comme je donne des cours d’équitation avec les Sports universitaires, j’ai pu toucher des RHT». Et lorsque vient l’été, les mesures Covid desserrent leur étau, les mandats redémarrent. «Là, je n’ai vraiment pas chômé», résume-t-elle. Au point d’en vouloir à tous les enthousiastes du télétravail. «Non, je ne trouve pas ça merveilleux, moi je travaille
comme une cinglée et je gagne tout juste le minimum pour vivre!» Son salaire mensuel, dépendant des mandats qu’elle obtient, oscille «entre 3000 et 3500 francs». En parallèle, Marie-Morgane Adatte planche sur sa première BO, «Les Mains glacées», depuis 2018. En avril de cette année, elle obtient une bourse pour artistes individuel.le.s, dotée de 2000 francs. «j’arrivais à dessiner deux planches par semaine si je ne travaillais pas à côté. Ce qui veut dire que je ne gagnais rien pendant ce temps-là. Cette bourse, ça m’a permis de me dégager du temps sans perdre trop d’argent.» Et puis, c’est le jackpot. Elle présente son projet à un éditeur et reçoit’ une réponse positive. Le 25 septembre dernier, «Les Mains glacées», bande dessinée-reportage issue d’une résidence sur un bateau au Groenland, sort enfin en librairies. Mais l’illustratrice reste lucide. «On ne devient pas riche en faisant de la BO!» Alors elle enchaîne les mandats de graphisme, qui s’intensifient. Pour Chocolatissimo, Goût & Région, les Mines d’Asphalte … «Aujourd’hui, j’ai le luxe de pouvoir trier les propositions que je reçois. Mais courir partout, c’est quelque chose que j’aime! Cette année, j’ai pris quatre jours de vacances … »


Article de Sarah Adatte, Arcinfo, 26 novembre 21