Devant le verre d’eau. Regards croisés sur la conférence comme vecteur de la vie intellectuelle (1880-1950)

Clavien, Alain, Vallotton, François,

2007, 139 pages, 18 €, ISBN:978-2-940146-79-6

En étudiant les intellectuels, les historiens ont le plus souvent privilégié la production écrite, qu’elle se manifeste sous la forme de livres, de brochures, de pamphlets, d’articles de journaux ou de revues, de proclamations, de pétitions… L’intellectuel est vu comme un « homme de lettres » dont l’arme de prédilection par excellence demeure la plume. Pourtant, la transmission des idées ne se limite pas à l’écrit, et, à négliger la transmission orale, on se prive de tout un pan, important, de l’activité intellectuelle. Dans le monde du savoir, le cours, ou la « dispute orale », constituent quelques-uns des fondements de la transmission des connaissances et de l’apprentissage académique.

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Description

En étudiant les intellectuels, les historiens ont le plus souvent privilégié la production écrite, qu’elle se manifeste sous la forme de livres, de brochures, de pamphlets, d’articles de journaux ou de revues, de proclamations, de pétitions… L’intellectuel est vu comme un « homme de lettres » dont l’arme de prédilection par excellence demeure la plume. Pourtant, la transmission des idées ne se limite pas à l’écrit, et, à négliger la transmission orale, on se prive de tout un pan, important, de l’activité intellectuelle. Dans le monde du savoir, le cours, ou la « dispute orale », constituent quelques-uns des fondements de la transmission des connaissances et de l’apprentissage académique. Les congrès et autres colloques scientifiques constituent autant de lieux d’échange, de sociabilité mais aussi de légitimité. Enfin, la conférence constitue une activité sociale importante ainsi qu’une modalité essentielle de la conquête d’un capital tant symbolique qu’économique des intellectuels.

Comment caractériser cet objet historique aux contours a priori indéterminés? Quelle fonction joue la conférence dans l’organisation du champ culturel et intellectuel? Comment évolue-t-elle au cours des XIXe et XXe siècles? C’est à quelques-unes de ces questions que veut répondre ce volume consacré à un support médiatique encore largement méconnu.

Table des matières

  • Le petit monde de la conférence parisienne. Analyse d’un échantillon de « cours et conférences » à Paris en janvier 1923 (Philippe Olivera)
  • « Ne pas donner au public le temps d’oublier votre nom »: Les conférences de Ferdinand Brunetière (Thomas Loué)
  • Karl Kraus conférencier-théâtralité, littérature et polémique (Marina Allal)
  • Une politique de l’apolitisme? Francesco Chiesa et les conférences de la « Scuola ticinese di cultura italiana » 1918-1939 (Nelly Valsangiacomo)
  • Les échanges d’informations entre intellectuels: La conférence comme outil de coopération intellectuelle à la Société des Nations (Corinne A. Pernet)
  • Action culturelle extérieure et Conférences: l’exemple de l’Alliance française, fin XIX et début XX e siècles (François Chaubet)
  • Les archives sonores du Club 44 à La Chaux-de-Fonds: Une source pour l’histoire intellectuelle (Christine Rodeschini)

Presse

Dans la revue Ponts

Les directeurs de cet ouvrage, dans leur « Introduction » (pp.7-14), soulignent la nouveauté, pour la recherche universitaire, du sujet abordé: la conférence comme véhicule (oral) des idées circulant parmi les intellectuels entre la fin du XIXe siècle et la première moitié du XXe. Issues d’un colloque organisé en 2004 à l’Université de Fribourg par le GRHIC (Groupe de recherche en histoire intellectuelle contemporaine), les interventions ici recueillies démontrent l’ample utilisation et diffusion de la conférence (non seulement dans le milieu strictement universitaire et intellectuel) dont l’une des raisons principales est certainement son intérêt financier.

Les écrits ici réunis s’intéressent à des domaines géographiques et culturels très variés. Pour ce qui est du contexte français (sur qui on ne va donner que des aperçus), on doit citer Philippe Ouvera (« Le petit monde de la conférence parisienne », pp.15-33), qui établit une typologie du phénomène de la conférence à Paris pendant les années 1920 et en analyse les thèmes principaux; Thomas Loué ( »’Ne pas donner au public le temps d’oublier votre nom’: les conférences de Ferdinand Brunetière », pp.35-53) propose une comparaison de l’activité de Ferdinand Brunetière en tant que conférencier et en tant que rédacteur de La Revue des Deux Mondes; François Chaubet (« Action culturelle extérieure et conférences: l’exemple de l’Alliance française (fin XIXe et début XXe siècles) », pp.107-121), à travers l’analyse du cas de l’Alliance Française et d’autres institutions similaires, met en évidence le rôle que celles-ci peuvent assumer dans le cadre des relations diplomatiques culturelles internationales. Pour ce qui concerne le domaine germanophone, l’intervention de Marina Allal (« Karl Kraus conférencier: théâtralité, littérature et polémique », pp.55-73) se concentre sur la prossémique de Karl Kraus tandis que Nelly Valsangiacomo (« Une politique de l’apolitisme? Francesco Chiesa et les conférences de la Scuola ticinese di coltura italiana (1918-1939) », pp.75-89) explore la conférence dans le contexte tessinois comme instrument pour promouvoir la culture officielle. Corinne Pernet (« Les échanges d’informations entre intellectuels: la conférence comme outil de coopération intellectuelle à la Société des Nations », pp.91-106) s’intéresse aux conférences de l’Institut international de coopération intellectuel, qui offrent un témoignage de la réflexion sur la nécessité, pour les intellectuels, d’employer des méthodes de communication modernes.
Mais c’est sur la seule intervention ne faisant pas partie du colloque de 2004 que nous allons nous concentrer un peu plus, étant donné qu’elle concerne le domaine suisse romand.
Christine Rodeschini (« Les archives sonores du Club 44 à La Chaux-de-Fonds: une source pour l’histoire intellectuelle », pp.123-135) a travaillé en fait sur un considérable corpus d’enregistrements sonores concernant plus de 2000 conférences tenues au Club 44 (le nombre fait allusion à l’année de sa fondation) de La Chaux-de-Fonds. Le Club se donnait pour but de proposer des conférences, tous les jeudis, sur plusieurs sujets pour permettre à tout le monde ou presque de s’informer dans plusieurs domaines culturels. L’habitude d’enregistrer les conférences produit, sur le long terme, un patrimoine que le DAV (Département audiovisuel de la bibliothèque de la Ville de La Chaux-de-Fonds) se charge actuellement de maintenir, de diffuser et de faire étudier.

Gian Luigi Di Bernardini, Ponts no 9, 2010, pp.181-182 

 Dans la revue Ricerche di storia politica

Il primo di questi lavori è una raccolta di contributi diversi, curata da Alain Clavien e Nelly Valsangiacomo. Gli autori sono, oltre agli stessi curatori, Erwin Marti, Milena Malandrini, Mauro Cerutti, Stéfanie Prezioso, Alexander Elsig e Arnaud Gariépy. È sufficiente uno sguardo veloce per rendersi conto di come essa rivesta interesse ben superiore a quello che il titolo sembra annunciare. Dietro al problema del fuoruscitismo, al tempo delle dittature europee, si nasconde l’eterna lacerazione di una Svizzera sospesa fra la propria cultura liberale e umanistica, e la sua realtà di piccolo stato neutrale, circondato da grandi e minacciose potenze espansioniste. Emerge qui con chiarezza quella « sindrome da accerchiamento » che ne ha spesso condizionato le decisioni politiche, sia all’interno che all’estero. Di cià fanno le spese i rifugiati, involontarie e scomode pedine in un gioco di equilibri più grandi di loro, talvolta generosamente accolti, talaltra inspiegabilmente boicottati o respinti oltre frontiera.
Gli autori descrivono, in pagine di raro interesse, talune storie di esuli antifascisti italiani tra le due guerre, paradigmatiche dell’eterno dramma dei fuggiaschi perseguitati che provano a ricostruirsi un’esistenza accettabile nel paese ospitante. La narrazione spazia dalle vicende dell’Associazione Romeo Manzoni, nata in Canton Ticino nel 1928 su ispirazione di Randolfo pacciardi, a quelle del quotidiano ginevrino Le moment, diretto dal giornalista romeno Alfred Hefter, alla rivista satirica Le canard libre, al prestigioso Journal des nations, fondato dal diplomatico e nobile trentino Carlo Emanuele a Prato. Il destino comune di tali iniziative è la loro vita breve, stentata, segnata dalla diffidenza degli intellettuali locali e dal timore delle autorità, sottoposte alle pressioni esplicite o implicite della Germania di Hitler e dell’Italia di Mussolini. Per que ste ragioni, la maggior parte dei fuorusciti considera la Svizzera assai più come terra di transito verso mete più lontane che come stabile dimora ove piantare le radici.
Latteggiamento della cultura ufficiale elvetica di fronte all’Italia fascista è in parte anche il te ma del secondo contributo qui considerato. Si tratta di una interessante antologia, i cui auto ri sono Alain Clavien, François Vallotton, philippe Olivera, Tomas Loué, Marina Allal, Nelly Valsangiacomo, Corinne Pernet, François Chaubert e Christine Rodeschini. Il testo analizza il ruolo della conferenza come strumento di scambio tra gli uomini di cultura europei in un arco temporale che abbraccia all’incirca mezzo secolo, tra la fine dell’Ottocento e la seconda guerra mondiale. Una delle ricerche più rilevanti appare quella di Nelly Valsangiacomo, dedicata alla Scuola ticinese di cultura italiana. Questa, diretta da Francesco Chiesa, intellettuale svizzero a tutto tondo (poeta, scrittore, giornalista, sovrintendente alla Biblioteca cantonale di Lugano), rappresenta forse l’istituzione didattica più vicina all’Italia fascista, ma non perché si schieri apertamente dalla sua parte. Latteggiamento del fondatore appare probabilmente ispirato a un pragmatismo eccessivo. Egli si limita a prendere attoche la cultura ufficiale italiana è quella che è. Pertanto, la sua principale preoccupazione consiste nel non provocare incidenti diplomatici con le autorità del vicino regno, e soprattutto col suo Console generale. Cià è confermato dai nomi dei più iUustri conferenzieri dalui ospitati: Giovanni Gentile, Margherita Sarfatti, Annie Vivanti e l’accademico d’Italia Massimo Bontempelli.
l rimanenti contributi riguardano invece i rapporti culturali tra la Svizzera e altri paesi europei, in particolare Francia e Germania. Oltre agli episodi specificatamente richiamati nellibro, affascina la ricostruzione storica assolutamente puntuale della rete internazionale di conferenzieri formatasi a cavallo tra l’Ottocento e il Novecento, divisi per discipline, accademie, istituti, scuole. Nel complesso un ottimo lavoro, utilissimo alla riscoperta delle origini e delle contraddizioni della democrazia europea in epoca moderna.

Carlo Vivaldi-Forti, Ricerche di storia politica, 3/08, pp.336-337

 Dans la revueMil Neuf Cent

Dans ce petit ouvrage, joliment intitulé Devant le verre d’eau, Alain Clavien de l’Université de Fribourg et François Vallotton de l’Université de Lausanne proposent de s’arrêter un instant sur une pratique intellectuelle bien connue, mais finalement peu étudiée: les conférences. Sept contributions nous éclairent sur ce « vecteur important de la circulation des idées tant sur un plan social que transnational ». Dans un ensemble fort intéressant mais qui souffre toutefois de son manque d’unité-défaut courant lorsqu’on publie ainsi les actes d’un colloque-sont évoqués « le petit monde de la conférence parisienne » en 1923 (Ph. Olivera), les conférences de Ferdinand Brunetière (T. Loué), Karl Kraus (M. Allal), Francesco Chies a et les conférences de la Scuola ticinese di cultura italiana de 1918 à 1939 (N. Valsangiacomo), la conférence comme outil de coopération intellectuelle à la Société des Nations (C. Pernet), l’Alliance française (F. Chaubet) et les archives sonores du Club 44 à la Chauxde-Fonds (C. Rodeschini).
La courte introduction de Clavien et Vallotton remet en perspective ces contributions éclectiques qui embrassent une-trop-ample période (1880-1950) et des milieux, des acteurs, des problématiques fort divers. Elle montre comment la conférence, savante ou littéraire, est un facteur de sociabilité pour les intellectuels à qui elle assure, pour quelques-uns d’entre eux, une autonomie financière. Certaines de ces conférences pouvaient prendre l’allure de véritables meetings: Brunetière parlait ainsi parfois devant 4000 personnes et publiait ensuite le texte de ses conférences que Loué qualifie de « produits dérivés ».
Dans plusieurs contributions sont évoquées les nombreuses fonctions de la conférence-instruire, diffuser des idées ou des messages, distraire-, ses codes et ses rites, le style d’éloquence qui est propre à chacune de ces formes. On s’arrêtera aussi sur le texte de C. Pernet consacré à l’institutionnalisation des conférences dans le cadre de la SDN et sur celui de F. Chauber sur l’Alliance française. Véritable instrument de l’action extérieure de l’État, la conférence apparaît comme un outil de propagande dans le cadre de la concurrence des nations. En contrepoint, on voit aussi que les tentatives de la SDN pour susciter une coopération intellectuelle internationale se soldèrent par un échec.
Les questions posées sont nombreuses. Comment caractériser cet objet historique aux contours indéterminés? Qyelle fonction joue la conférence dans l’organisation du champ culturel et intellectuel? Comment évolue-t-elle au cours des XIXe et XXe siècles? Quelle place la conférence tient-elle dans la stratégie d’un intellectuel qui entend être reconnu immédiatement tout en construisant une œuvre écrite avec le souci de la postérité? Une étude comparant plusieurs parcours serait utile de ce point de vue.
Clavien et Vallotton concluent leur propos en évoquant « des potentialités heuristiques d’un tel objet ». Ce petit livre qui ne répond certes pas à toutes les questions qu’il pose, constitue une introduction utile pour qui souhaiterait explorer cette voie.

Éric Thiers, Mil Neuf Cent. Puissance et impuissance de la critique, 26/2008, pp.175-176