Revue historique vaudoise 130/2022

La Franc-maçonnerie: de l’ombre à la lumière

Klein, Sylviane,

ISBN:978-2-88901-226-8, 2022, 264 pages, 28 €

Présente en Suisse et dans le canton de Vaud depuis la première moitié du XVIIIe siècle, la franc-maçonnerie reste pourtant peu étudiée. Ce nouveau numéro de la RHV propose douze éclairages sur cette société longtemps réputée secrète.

Format Imprimé - 40,00 CHF

Description

Sujet vaste, complexe et pluriel, la Franc-maçonnerie reste encore l’objet de nombreux débats. Bien que présente en Suisse et dans le Canton de Vaud depuis la première moitié du XVIIIe siècle, la Franc-maçonnerie et son histoire n’ont que rarement été étudiés en dehors des cercles maçonniques. Regroupant douze contributions d’auteur-e-s aussi bien issus de loges que de la recherche académique, ce nouveau numéro de la Revue historique vaudoise se penche sur l’évolution des loges en terre vaudoise du XVIIIe siècle à nos jours.

Ce volume présente les différentes obédiences et offre un parcours à travers trois siècles d’histoire maçonnique, les rapports avérés ou fabulés entre le monde politique et la maçonnerie, mais aussi sur des domaines aussi divers que l’architecture des loges, l’apparition de la franc-maçonnerie féminine ou encore la difficile question de la gestion des archives et de leur accessibilité de cette société longtemps considérée comme secrète. De plus, ce numéro bénéficie d’une iconographie inédite grâce à l’ouverture des archives des loges et de leurs temples. Loin de se limiter au canton de Vaud, ce numéro présente aussi les loges romandes dans toute leur diversité architecturale et donne un aperçu des relations souvent tourmentées entre la franc-maçonnerie et le Valais. Ce dossier thématique est complété par une étude novatrice sur le mouvement des Ames intérieures, cercle religieux réservé aux élites lausannoises qui du XVIIIe à la fin du XIXe siècle pratiquait un culte crypto-catholique en terre protestante.

Ouvrage collectif sous la direction de Sylviane Klein.
Coordination: David Auberson.

Presse

La franc-maçonnerie dépoussiérée

La «Revue historique vaudoise» parue ce mois-ci aux Éditions Antipodes publie douze contributions analysant l’essor, l’évolution et l’impact de la franc-maçonnerie dans notre canton du XVIIIe siècle à nos jours. Ce numéro thématique de qualité est bien loin de ces publications rabâchant sans cesse le thème du complot maçonnique et autres visions fantasmées de l’histoire. L’ancien directeur des Archives cantonales vaudoises, Gilbert Coutaz, constate que la franc-maçonnerie suisse a été pendant longtemps ignorée par les universitaires et que les histoires générales de la Suisse n’intègrent que rarement la franc-maçonnerie au récit historique. En revanche, si les universitaires n’ont que peu traité le sujet, les publications rédigées par des francs-maçons abondent, même si celles-ci ne répondent pas toujours aux critères de la recherche historique. La franc-maçonnerie ne se mure cependant plus dans le secret et a compris qu’une stratégie de communication plus ouverte ne saurait lui nuire. Ainsi, un musée maçonnique a ouvert ses portes au grand public à Berne en 2018. Des membres de la franc-maçonnerie acceptent de paraître à visage découvert dans la presse ou de diffuser dans les journaux des photographies des intérieurs de leurs temples. Quant aux loges, elles sont nombreuses aujourd’hui à disposer d’un site internet où elles dévoilent leur histoire, leurs rites et leurs motivations. L’implantation de la franc-maçonnerie dans le canton de Vaud est un phénomène de longue durée qui débute dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et est toujours vivace. Malgré la surveillance ou l’oppression dont ces loges furent victimes, elles se développèrent tout en changeant souvent leur lieu de réunion. À Neuchâtel, une loge est créée en 1743, une à Bex en 1760, une autre à Vevey en 1778. La Vraie Union est fondée à Nyon en 1787, loge encore active de nos jours. A en croire les registres indiquant l’origine des premiers membres de cette loge nyonnaise, elle n’était pas réservée à une élite sociale fortunée. Les métiers représentés y sont, en effet, très variés: menuisier, agriculteur, tanneur, apothicaire, chirurgien, négociant, instituteur, vétérinaire et même étudiant.
Actuellement, Vaud demeure le canton qui détient le plus grand nombre de loges sur les 151 recensées en Suisse. S’il demeure difficile d’évaluer l’impact des francs-maçons, G. Coutaz constate qu’«il ne fait pas doute que l’implantation des loges dans les villes et les villages a pesé, souvent de manière subtile, sur la vie locale, ne serait-ce que par ses initiatives philanthropiques et pour les plus démunis». Aujourd’hui, les diverses obédiences en Suisse comptabilisent environ 4850 membres dont 56% dans la partie francophone, 33% dans la partie germanophone, 7% au Tessin et le reste comprenant les loges anglophones et hispanophones. La place des femmes y reste néanmoins toujours très marginale, puisque l’on compte 85% d’hommes pour 15% de femmes. A cet égard, le retard à combler par rapport à la France est évident. Alors que des Françaises furent initiées dès 1740, il a fallu attendre 1964 pour que soit créée la première loge féminine de Suisse à Genève. Nyon a quant à elle sa première loge féminine depuis 1992 sous le nom de «Tempérance». A tous ceux qui veulent dépasser la vision parfois caricaturale de la franc-maçonnerie, nous recommandons vivement ce numéro thématique fondé sur des analyses historiques de qualité.

Article de Nicolas Quinche dans La Côte, le 23 décembre 2022.