Nouvelles Questions Féministes Vol. 24, No 2

Féminismes dissidents en Amérique latine et aux Caraïbes

Curiel, Ochy, Falquet, Jules, Masson, Sabine,

2005, 142 pages, 13 €, ISBN:2-940146-63-2

A bien des égards, l’Amérique latine et les Caraïbes sont « en pointe » dans les luttes de résistance à la mondialisation et dans l’élaboration d’alternatives au capitalisme global. Que ce soit avec le mouvement zapatiste indien au Mexique, le Mouvement des sans Terre au Brésil, celui des Piqueter@s en Argentine, ou encore les luttes actuelles pour la nationalisation des hydrocarbures en Bolivie, le continent du Che et de Rigoberta Menchú nous rappelle régulièrement qu’il y a toujours des raisons d’espérer et de s’organiser pour reprendre notre destin en main. Il en va de même en ce qui concerne les luttes des femmes et les mouvements féministes et lesbiens. Les Latinas et Latinas et les Caribéennes célèbreront bientôt leur Xème rencontre féministe continentale, un processus de rencontre et d’élaboration collective qui se poursuit sans interruption depuis 1981-même si les débats et les conflits sont parfois vifs. Un bel exemple de persistance et de dynamisme qui laisse rêveuses celles d’entre nous qui ont eu la chance de rencontrer les féministes de ces régions. Malheureusement, ces mouvements sont relativement méconnus en Europe. C’est pour contribuer à y remédier que nous avons consacré ce numéro aux « féminismes dissidents d’Amérique latine et des Caraïbes ». 

Format Imprimé - 17,00 CHF

Description

A bien des égards, l’Amérique latine et les Caraïbes sont « en pointe » dans les luttes de résistance à la mondialisation et dans l’élaboration d’alternatives au capitalisme global. Que ce soit avec le mouvement zapatiste indien au Mexique, le Mouvement des sans Terre au Brésil, celui des Piqueter@s en Argentine, ou encore les luttes actuelles pour la nationalisation des hydrocarbures en Bolivie, le continent du Che et de Rigoberta Menchú nous rappelle régulièrement qu’il y a toujours des raisons d’espérer et de s’organiser pour reprendre notre destin en main. Il en va de même en ce qui concerne les luttes des femmes et les mouvements féministes et lesbiens. Les Latinas et Latinas et les Caribéennes célèbreront bientôt leur Xème rencontre féministe continentale, un processus de rencontre et d’élaboration collective qui se poursuit sans interruption depuis 1981-même si les débats et les conflits sont parfois vifs. Un bel exemple de persistance et de dynamisme qui laisse rêveuses celles d’entre nous qui ont eu la chance de rencontrer les féministes de ces régions. Malheureusement, ces mouvements sont relativement méconnus en Europe. C’est pour contribuer à y remédier que nous avons consacré ce numéro aux « féminismes dissidents d’Amérique latine et des Caraïbes ».

Sommaire

Edito

  • Féminismes dissidents en Amérique latine et aux Caraïbes (Ochy Curiel, Sabine Masson, Jules Falquet)

Grand Angle

  • Vue d’un balcon lesbien (Melissa Cardoza)
  • Noircir le féminisme (Sueli Carneiro)
  • Ialodês et féministes. Réflexions sur l’action politique des femmes noires en Amérique latine et aux Caraïbes (Jurema Werneck)
  • Construire notre autonomie. Le mouvement des femmes indiennes au Mexique (Martha Sánchez Néstor)
  • Les chemins complexes de l’autonomie (Amalia E. Fischer P.)

Champ libre

Parcours 

  • Autoportrait féministe: voyages entrecroisés dans le temps (Elizabeth Alvarez Herrera)

Comptes rendus

  • Rebecca Rogers (éd.) La mixité dans l’éducation. Enjeux passés et présent (Martine Chaponnière)
    Maria Nengeh Mensah. Ni vues ni connues? Femmes, VIH, médias (Marilène Vuille)

Collectifs 

  • La lutte des travailleuses domestiques en Bolivie (Casimira Rodríguez Romero)
    Le « Mouvement indépendant des femmes » du Chiapas et sa lutte contre le néolibéralisme (Mercedes Olivera B.)

Presse

Dès l’introduction le problème qu’a posé la réalisation de ce numéro est exposé: « Nous avons débattu et réfléchi ensemble la question des barrières de « race » et de classe qui nous traversent, nous les féministes des différentes parties du monde et qui sont notamment le reflet des rapports de domination entre le Sud et le Nord».

Autre problème évoqué: «les multiples luttes des femmes contre le racisme, le sexisme et l’exploitation allaient devoir être exprimées dans un langage académique, ce qui allait nous éloigner de ces femmes… Alors que le mouvement féministe devrait lutter contre la division sociale et raciale du savoir et du travail intellectuel ».

Deux articles présentant ces féminismes « dissidents » vont illustrer particulièrement ces propos. Le premier est celui de Jurema Werneck  « Ialodês et féministes ». Réflexions sur l’action politique des femmes noires en Amérique latine et aux Caraïbes où s’exprime une volonté de prendre en compte la spécificité du combat de ces femmes afro-descendantes. Dans leur combat très ancien, antérieur au féminisme inventé par les Occidentales, ces femmes ont réussi à travers des pratiques spirituelles ou religieuses à résister aux pires effets de l’esclavage. Elles ont eu des rapports conflictuels avec les féminismes des femmes blanches et ont réussi à modifier le visage du féminisme en exigeant d’associer la lutte contre le racisme à la lutte contre le patriarcat.

Dans l’autre, Martha Sanchez Nestor sous le titre « Construire notre autonomie, le mouvement des femmes indiennes du Mexique » évoque la volonté farouche de ces femmes de se faire entendre dans la sphère politique dans divers mouvements mixtes mais aussi à travers des structures qu’elles ont créées pour lutter pour leur revendication « en tant que femmes ». Se pose la question pour elles des relations avec les féministes mexicaines. Diverses attitudes sont défendues parmi elles: certaines pensent que les dialogues et rencontres permettent des avancées, mais d’autres pensent qu’être féministe veut dire ne pas tolérer les hommes ou être lesbienne. Pour certaines, la reconnaissance de l’autonomie des peuples indiens est un préalable à une défense des droits des femmes. D’ailleurs l’action spécifique de ces femmes est ressentie comme quelque chose de négatif dans la communauté indienne. De toute façon le féminisme ne constitue pas un thème d’intérêt commun. La volonté exprimée par l’auteur est de créer des ponts pour rendre possibles des alliances avec les féministes mexicaines qui de manière générale ne mesurent pas l’enjeu du combat des femmes indiennes. En dernière analyse sa conviction est qu’elles sont appelées à l’avenir à s’allier pour créer des conditions d’existence dignes pour les femmes.

On aura compris qu’à partir de l’analyse des luttes de femmes en Amérique latine, les questions posées et illustrées par ce numéro sont à la fois fondamentales et existentielles pour les femmes et appellent des stratégies mûrement réfléchies qui sont loin d’être secondaires.

Évelyne Carrez, LibreSens, no 156, 2006.