L’aventure du Jura. Cultures politiques et identité régionale au XXe siècle

Hauser, Claude,

2004, 168 pages, 16 €, ISBN:2-940146-41-1

Un quart de siècle après l’entrée en souveraineté de la République et Canton du Jura, la fameuse « Question jurassienne » demeure et interroge notre présent. Si elle n’occupe plus le devant de l’actualité, elle marque encore la mémoire collective helvétique.

Format Imprimé - 20,00 CHF

Description

Un quart de siècle après l’entrée en souveraineté de la République et Canton du Jura, la fameuse « Question jurassienne » demeure et interroge notre présent. Si elle n’occupe plus le devant de l’actualité, elle marque encore la mémoire collective helvétique.

Ce livre retrace l’histoire d’un essor identitaire et national qui fut tout sauf tranquille, suivant ou anticipant les grandes crises et évolutions du XXe siècle: poussées nationalistes et idéaux fédéralistes, cultures de guerre et antimilitarisme, décolonisation et mouvements contestataires…Le processus qui a abouti à la création du 23e canton suisse a en effet largement dépassé les limites d’un conflit Berne-Jura, en ébranlant les fondements politiques de la Confédération.

Ce livre propose une interprétation globale du conflit jurassien en le replaçant dans son cadre géographique, idéologique et culturel. Comprendre l’aventure du Jura au XXe siècle revient en effet à analyser les cultures politiques des principaux acteurs et mouvements qui s’y sont engagés.

Presse

Le conflit jurassien s’inscrit dans les mouvances du XXe siècle

Claude Hauser, historien et auteur de L’aventure du Jura démontre comment la Question jurassienne est enracinée dans le contexte contemporain

Le Jura commémore cette année les 25 ans de son accession à l’indépendance cantonale et les 30 ans du plébiscite d’autodétermination du 23 juin 1974. A cette occasion, plusieurs ouvrages historiques sortent de presse, dont L’aventure du Jura, de l’historien jurassien Claude Hauser, professeur à l’Université de Fribourg. Il montre que la Question jurassienne n’est pas un phénomène local, mais s’inscrit dans la dynamique historique du XXe siècle.

Le Temps: Qu’est-ce qui distingue votre ouvrage des autres récits historiques de la Question jurassienne?

Claude Hauser: Je propose un essai d’interprétation de l’histoire politique et culturelle du Jura au XXe siècle, qui s’inscrit dans un contexte plus vaste. J’ai mis l’accent sur les acteurs et les mouvements engagés dans le conflit, pour comprendre leurs cultures politiques et leurs antagonismes. Mon livre est très complémentaire des autres, en particulier de celui d’Alain Pichard, La Question jurassienne (Presses polytechniques et universitaires romandes).

-Or, selon vous, la Question jurassienne ne serait pas qu’un phénomène local et la quête d’autonomie, en vase clos, d’une petite région suisse?

-Non. Le conflit jurassien s’inscrit dans les mouvances et les phénomènes sociopolitiques globaux qui ont émaillé le XXe siècle: l’émergence du régionalisme et du droit des peuples de disposer d’eux-mêmes, le nationalisme romand, l’influence de la décolonisation. La défaite de la France en 1940 a augmenté la francophilie des Jurassiens et va nourrir leur aversion pour la germanisation. Dans les années 60 et 70, les Jurassiens se sont inspirés des mouvements contestataires et progressistes.

-Bâti sur l’ethno-linguisme, l’argumentaire de Roland Béguelin n’était-il que de la propagande?

-Roland Béguelin était convaincu de la supériorité de la culture française. Mais les thèses ethno-linguistes ont aussi été utilisées comme propagande, destinée à ébranler le fédéralisme et à faire réagir la Confédération. Ce qui a d’ailleurs fonctionné.

– On dit volontiers aujourd’hui que le Jura est devenu un canton comme les autres. La culture politique des Jurassiens a-t-elle perdu de son originalité?

-Oui et non. Cette culture magnifiée des années 1960 et 1970 était liée à un contexte de bouillonnement intellectuel et politique. Faite d’idéaux progressistes et non conformistes, la culture politique jurassienne comprend en elle aussi le conservatisme propre à la culture suisse. Il est piquant de ressortir le folklore des fêtes du peuple jurassien. Le Jurassien est contestataire, mais il est également très suisse. Aujourd’hui, c’est vrai, la culture politique jurassienne est moins originale. Ce qui le reste, c’est la pérennité de l’interrogation sur le devenir institutionnel de la région et l’effort de réconciliation entre Jurassiens, profondément déchirés lors des plébiscites des années 1970.

-Vous affirmez que la Question jurassienne n’est pas résolue. Comment la résoudre? Vous donnez du crédit à l’Assemblée interjurassienne, à la voie du pragmatisme supplantant les symboles historiques et idéologiques.

-La démarche se situe au niveau médian de la culture politique. On y discute de dossiers pragmatiques, de la vie de tous les jours. En évacuant les passions idéologiques, chacun espère progresser, lentement mais durablement, vers une solution définitive de la Question jurassienne. Quant à dire comment sera résolu le conflit… Il est probable que, comme par le passé, le contexte extérieur aura de l’influence.

-Plutôt qu’une belle image de la lutte séparatiste, pourquoi avoir choisi une série d’esquisses de ce qui est devenu le drapeau jurassien pour la couverture de votre ouvrage?

-C’est un document des années 1950, lorsque le drapeau jurassien a été dessiné par Paul Boesch, à la demande de l’association Pro Jura. Le tâtonnement et la succession des esquisses illustrent l’aventure du Jura, le foisonnement et la progression des idées, des stratégies et des réflexions. Ou comment traduire son identité au travers d’un symbole.

Propos recueillis par Serge Jubin, Le Temps, 3 mai 2004

La Ligue vaudoise, marraine du Jura

De Maurras à Mai 68, un livre retrace les idées qui ont nourri le séparatisme.

Au-delà de la politique, le combat séparatiste jurassien s’est aussi joué dans le domaine des idées et des lectures. Claude Hauser, professeur d’histoire à l’Université de Fribourg, nous le rappelle dans un livre paru pour les 25 ans du canton. Il réduit au strict minimum les aspects institutionnels de la lutte pour développer les influences intellectuelles qui l’ont conditionnée. Beaucoup venaient des rives du Léman.

Le séparatisme embryonnaire de 1917 s’inspire des Helvétistes réactionnaires emmenés par Gonzague de Reynold et d’écrivains nationalistes français tels que Maurice Barrès. Puis c’est le, mouvement romandiste, très maurrassien, qui marque les élites jurassiennes des années trente. Tant le « fossé » qui divise la Suisse en 14-18 que la défaite française de 1940 attisent l’alémanophobie. Mais le Jura sympathise aussi avec les grandes causes internationales: respect des nationalités en 1918, décolonisation après 1945.

Fondé en 1947, le Rassemblement jurassien (RJ) bénéficie très tôt de l’appui de la Ligue vaudoise ultrafédéraliste. Des avocats lausannois le, conseillent pour le lancement d’initiatives complexes. Et c’est aux Cahiers de la Renaissance vaudoise que paraît en 1963 le premier ouvrage expliquant la sensibilité jurassienne aux Confédérés. En parallèle, les fédéralistes romands créent une association proséparatiste chargée d’empêcher la dérive francophile du RJ.

Mutations en profondeur

Cette dérive n’aura pas lieu. Car tandis que Roland Béguelin fricote avec les salons maurrassiens de Paris et les partisans de l’Ethnie française, les jeunes séparatistes préfèrent des causes plus progressistes. Ils se solidarisent avec les régionalistes occitans, les antinucléaires, les antimilitaristes du Larzac, les soixante-huitards. Les catholiques sortent de leur ghetto et troquent les valeurs religieuses d’antan contre des idéologies nouvelles. Mais ce changement échappe aux antiséparatistes protestants, qui n’y voient que de machiavéliques manœuvres vaticanes… Le RJ, lui, s’adapte parfaitement à cette évolution, comme le montre l’analyse des mues successives de la « Fêtes du peuple ».

Finalement, la percée décisive ne sera pas l’œuvre de vieux nationalistes, mais d’une génération autogestionnaire et écologiste qui, comme au Québec, prône la « Révolution, tranquille ». Mais le nouveau canton, repris en main par des élites bourgeoises, ne sera pas un Etat d’avant-garde pour autant.

Alain Pichard, 24 Heures, 12 mai 2004

Claude Hauser, professeur d’Histoire contemporaine, à l’Université de Fribourg, a déjà consacré plusieurs études à la question jurassienne. L’aventure du Jura est une synthèse qui permet de faire le point sur un conflit qui dure avec une intensité variable depuis longtemps. L’auteur concentre son texte sur le XXe siècle qui a vu la créationdu vingt-sixième canton confédéré sur une partie du territoire de l’ancien évêché de Bâle. Le sous-titre du livre donne le ton: Cultures politiques et identité régionaleau XXe siècle.

Il est impossible de prévoir quand et comment la question jurassienne sera résolue. Les aînés l’ont vue renaître après l’affront fait à Georges Möckli en 1947, écarté du Département des travaux publics du canton de Berne parce qu’il était francophone. Les cadets ne connaissent que les épisodes plus récents. Claude Hauser, par une information dense et des documents historiques précieux, offre l’occasion de découvrir des aspects connus et peu connus de la vie intellectuelle en Suisse romande. La bibliographie est abondante. La conclusion est intéressante car elle fait appel à des utopies: « d’abord la volonté de mettre à plat les conflits d’un passé proche et de les dépasser; ensuite la reconnaissance réciproque des différences sans évacuer pour autant les possibilités de vie commune avec les autres. Une utopie qui implique en premier lieu une meilleure connaissance de soi… ». A souligner l’appui à la publication accordé tant par la République et canton du Jura que par l’Office de la culture du canton de Berne.

 Charles F. Pochon, Domaine Public No 1603, 21 mai 2004

(…) Dans L’Aventure du Jura (Ed. Antipodes) , Claude Hauser fait le bilan d’un siècle de littes en s’attachant plus aux idées qu’aux événements. Avec un superbe esprit de synthèse, il montre comment la question jurassienne a, pendant tout le XXe siècle, été tributaire du mouvement dumonde, s’appuyant sur le nationalisme quand il primait, sur la décolonisation quand elle est apparue. (…)

Gérard Delaloye, Le Matin dimanche, 20 juin 2004

Es regnete Freiheit

Jura-plebszit: Vor dreissig Jahren sagten die JurassierInnen Ja zu einem eigenen Kanton. Doch wo sind die Utopien von damals geblieben.

(…) Claude Hauser, ein selbst aus einer separatistischen Familie stammender Professor für Zeitgeschichte an der Universität Freiburg, legt zum Jahrestag des Juraplebiszits eine neue Untersuchung vor: L’aventure du Jura (Editions Antipodes). Darin zeigt er, dass die jurassische Autonomiebewegung kein auf die Region beschränktes Mikroereignis war. Sie ist vielmehr Teil der grossen geistigen und sozialen Bewegungen des 20. Jahrhunderts, namentlich des Kampfes für die Entkolonisierung und das Selbstbestimmungsrecht der Völker. « Es war eine sanfte Revolution ohne soziale Forderungen, deren Kraft darin lag, auch Ideen der Vergangenheit zu integrieren », sagt Hauser.

So etwa der Kampf gegen einen geplanten Waffenplatz für Panzer und Kavallerie in den Freibergen im Jahre 1963. Er mobilisierte Separatisten, die sieh gegen die « Berner Besetzung » und den « Raub jurassischer Erde durch Fremde » wehrten, Bauern, die ihre Weiden und traditionellen Lebensformen verteidigten, die armeekritische neue Linke sowie Intellektuelle, Künstler und Poeten wie Jean Cuttat oder Alexandre Voisard im Engagement für Kreativität und Freiheit. « Im Bündnis zwischen Antimilitaristen, linken Christen, Bauern, Kulturschaffenden und Separatisten liegt eine der Besonderheiten der jurassischen Autonomiebewegung », sagt Hauser.

(…) Auch der Historiker Hauser sieht heute andere Prioritäten, als sie damals gesetzt wurden: zum einen in der konkreten Zusammenarbeit zwischen dem Berner Jura und dem Kanton Jura in der Assemblée interjurassienne, zum andern in einer notwendigen Neudefinition von Regionalismus und Föderalismus in einem transnationalen, europäischen Rahmen. « Die Autonomiebewegung war auch hier fortschrittlich », stellt er fest. Sie habe die Frage nach der politischen Kultur, nach der Gesellschafts- und Staatskonzeption gestellt-dieselben Fragen sind heute auf europäischer Ebene aktuell. Für ihn ist die Utopie nicht gestorben, sie mache nur gerade mal Ferien.

Helen Brügger, Woz Die Wochenzeitung, 17 juin 2004

L’aventure du jura

De Claude Hauser (éditions Antipodes 2004). 25 ans après l’entrée en souveraineté du 23ème canton, 30 ans après le fameux plébiscite du 23 juin, la « question jurassienne » reste ouverte. Le mouvement autonomiste jurassien (MAJ) a déposé une pétition demandant au canton de relancer l’idée de réunification, ce qui implique une redistribution des cartes, un New Deal helvétique.

Pour la première fois de son histoire, le gouvernement jurassien a dû différer son message annuel sur l’état de la (ré)union, de juin à septembre. Le remarquable ouvrage du professeur à l’université de Fribourg « propose une interprétation globale du conflit jurassien, en le replaçant dans son cadre géographique, idéologique et culturel. Comprendre l’aventure du Jura au XXème, siècle revient, en effet, à analyser les cultures politiques des principaux acteurs et mouvements qui s’y sont engagés ». Ce livre de 150 pages prolonge la thèse du chercheur ajoulot, consacrée à l’histoire intellectuelle qui a formaté les futurs acteurs de l’aventure jurassienne. Il complète également le livre de Pichard consacré à la question jurassienne. Profitons de l’occasion pour saluer le courage de nos éditeurs romands qui osent, dans un contexte économique difficile, lancer des collections ambitieuses, visant à populariser des ouvrages de chercheurs de notre pays, sans caricaturer. Le « Savoir suisse », par exemple, a publié une vingtaine d’ouvrages parmi lesquels nous mentionnerons Une Suisse en crise, de Ziegler à Blocher, de Jürg Altwegg, jeune journaliste zurichois de Genève, La politique du logement, Les Burgondes, Les Lacustres, La politique étrangère de la Suisse, Nationalisme et populisme en Suisse, La recherche: affaire d’Etat, Nicolas Bouvier, Carl-Gustav Jung. Les Editions Antipodes ont choisi le même créneau, promeuvent les mêmes ambitions et connaissent le même succès croissant d’un public intéressé par le gai savoir. Dirigée par Alain Clavien, Bernard Müller et Laurent Tissot, la collection « Histoire.ch » a déjà diffusé, entre autres, les ouvrages suivants: Le spectacle cinématographique en Suisse (1895-1945) de Gianni Haver et Pierre-Emmanuel Jacques, 2003, L’invention de l’horloger. De l’histoire au mythe de Daniel Jeanrichard, livre de Laurence Marti, La Tour Bel-Air. Pour ou contre le premier gratte-ciel à Lausanne (1997) et des recherches multiples dans les domaines suivants: « Médias et Histoire », « Existence et Société », Nouvelles questions féministes, « Littérature », et même « Cuisine », avec «La Cuisine distinguée» coédition: La Distinction. Tous ces trésors, les Lausannoises et Lausannois peuvent les trouver à la libraire Basta qui se fera un plaisir de donner tous renseignements utiles aux lectrices et lecteurs des autres cantons romands (tél.: 021 691 39 37)

L’ouvrage de Claude Hauser est sorti au printemps, précipitez-vous pour l’acheter, le lire, l’offrir à vos proches. Après avoir salué confrères et amis, l’auteur s’adresse, d’une façon sympathique, à sa déjà-grande famille qui, « depuis longtemps, supporte avec patience, quelques anecdotes, entre la poire et le fromage … Fribourg, Carnaval 2004 » (la période où, chacun le sait, bien des masques tombent).

Une lecture nouvelle de notre passé

« Ce livre retrace l’histoire d’un essor identitaire et national qui fut tout sauf tranquille, suivant ou anticipant les grandes crises et évolutions du XXe,e siècle, poussées nationalistes et idéaux fédéralistes, cultures de guerre et antimilitarisme, décolonisation et mouvements contestataires… le processus qui a abouti à la création du 23ème, canton suisse a, en effet, largement dépassé les limites d’un conflit Berne-Jura, en ébranlant les fondements politiques de la Confédération ». Le politologue jurassien Bernard Voutat, universitaire à Lausanne, avait, un des premiers, étudié l’identité jurassienne en analysant les discours des protagonistes des combats jurassiens. Notre auteur s’inspire des travaux de l’historien Serge Bernstein qui décompose le concept de « culture politique » en trois niveaux distincts qui interagissent entre eux et évoluent dans Ie temps.

a. Superstructure: rites et symboles, fêtes (geste et représentation visuelle), discours codé (mots clés porteurs de sens)

b. Niveau intermédiaire: vision politique et institutionnelle (organisation politique de l’Etat), conception de la société idéale

c. Fondements: base philosophique ou doctrinale (vulgate philosophique accessible à tous), lecture commune et normative du passé historique

Ainsi, au niveau de la superstructure, Claude Hauser analyse-t-il l’iconographie des fêtes du Peuple, depuis 1947, les émissions télévisuelles censurées ou non, les discours des fameuses conférences de presse de septembre et les mots-clés des divers moments historiques: autonomie, indépendance, Etat de combat, discours commémoratif du MAJ, langage pragmatique-suisse-des acteurs de l’AIJ (Assemblée interjurassienne) qui vise le même idéal par un cheminement via les problèmes concrets. Dans les années 50, il est piquant de revoir les chars allégoriques exhibant les 3 Jurassiens aux bras noueux-sans ironie-les lance drapeaux, les amazones, gymnastes des Franches-Montagnes bien braves, le bailli Gessler de sinistre mémoire. Les slogans « Pourquoi pas nous ? », « 23ème canton », attestent de la volonté d’intégrer une Confédération helvétique modélisée (captatio benevolontiae?).

Le niveau intermédiaire concerne les discours sur l’organisation rêvée, puis réalisée du pays: demi-cantons (idée lancée par le professeur bâlois Lüthi, télécommandé?), autonomie dans le canton (3ème force), canton indépendant, de combat (Art. 138) puis normalisé (restitution de la pierre d’Unsprunnen à Shawne par Jean-François NDLR), 3, 6 ou 7 districts? Abandon rapide de Bienne, en deux temps du Laufonnais (triste affaire des « caisses noires » de Berne).

Les fondements: séparatistes et antiséparatistes ont, naturellement, leur propre vision de l’histoire, périodisée et relue selon les occurrences. Vision idéalisée de l’Evêché de Bâle, sorte d’âge d’or avec la Période française de la République rauracienne et Département du Mont Terri(ble), pour les séparatistes, grande importance accordée par les antiséparatistes aux diverses combourgeoisies du Xvème, aux combats liés à la Réforme, à la spécificité des régions.

Suite aux travaux réalisés par de nombreux historiens autour de Bernard Prongué, une conclusion importante s’impose, développée dans le volume « Espace jurassien et identité collective » intitulé sobrement « L’écartèlement ». En effet, la notion de « peuple jurassien », référent identitaire reconnu dans la Constitution bernoise révisée en 1950 n’avait plus d’existence réelle au cours des années 80. Rappelons les 3 crises parallèles. Politique d’abord, qui subdivise le pays en trois sous-ensembles séparés par des frontières cantonales: le canton du Jura, le Jura resté bernois et le Laufonnais rattaché à Bâle. Sociale ensuite avec les divisions pérennes de la vie associative et communautaire en raison du conflit, enfin économique avec une crise qui a débuté, alors que le canton organisait son espace fraîchement conquis. La crise horlogère frappe durement le Jura historique et géographique depuis la fin des années 70. Cela ne s’arrange guère avec le temps. « Un symbole est révélateur à cet égard: c’est au moment des Jeux olympiques de Calgary, en 1988, chronométrés par Longines, que St-Imier a appris, par la TV, le transfert d’une partie de ses activités industrielles horlogères à l’extérieur de la région jurassienne… ». L’identité jurassienne-ou son reliquat-est donc très pluriel(le) et en mutation constante.

Les Rauracienne(s)

Claude Hauser étudie essentiellement le conflit jurassien au XXème, siècle, dès 1947, mais il relie naturellement les fils de l’histoire à quelques antécédents significatifs au XIXème siècle. Ainsi en est-il de cette analyse croisée de la Rauracienne de Xavier Stockmar (politicien radical du XIXème siècle) et de celui de 1947, due à la plume de Roland Béguelin. Le texte originel s’inscrit dans les turbulences nationalistes européennes du XIXème siècle.

« Des bords du Tage à ceux de la Baltique Entendez-vous le sinistre beffroi?

Voyez-vous fuir de leur demeure antique Ces rois saisis de remords et d’effroi

[ … ] Unissez-vous fils de la Rauracie et donnez-vous la main »

(En 1831, Stockmar s’était approché des révolutionnaires neuchâtelois avec qui il avait rêvé d’un canton commun avec le Jura. Cette idée d’un espace du Chasseral est récurrente, ndlr).

Relevons, au fil du texte, pour le plaisir

« Des séducteurs, ennemis de leurs frères, Ont dit : formons deux camps sous deux couleurs

Mais répondez à ces voix étrangères Le pays seul fera battre nos cœurs ».

La Nouvelle Rauracienne

Pour nos lectrices et lecteurs-même Jurassiens-il n’est pas inutile de donner le texte in extenso:

Du lac de Bienne aux portes de la France

L’espoir mûrit dans l’ombre des cités

De nos cœurs monte un chant de délivrance,

Notre drapeau sur les monts a flotté Vous qui veillez au sort de la patrie, Brisez les fers d’un injuste destin ! Si l’ennemi de notre indépendance

Dans nos vallons veut imposer sa toi,

Que pour lutter chacun de nous s’élance

Et dans ses rangs jette le désarroi !

D’un peuple libre au sein de l’Helvétie

Notre passé nous montre le chemin.

Le Ciel fera germer notre semence,

Marchons joyeux, c’est l’heure du Jura

Demain nos cris, nos chansons et nos danses

Célébreront la fin de nos combats.

Et dans la gloire au matin refleurie,

Nous chanterons un hymne souverain.

Refrain :

Unissez-vous, fils de la Rauracie,

Et donnez-vous la main, et donnez-vous

la main !(bis)

La première strophe affirme l’identité politique des Jurassiens. « Elle définit le territoire, son caractère montagneux et varié, tout en opposant l’idée de liberté et de délivrance-qui rime avec France-à une destinée injuste ». Connotation française également avec les chants de délivrance, les gestes de la résistance activement soutenue par les Jurassiens durant la Seconde Guerre mondiale. Le deuxième couplet, plus belliqueux, reste cependant vague quant à l’Ennemi (paysan alémanique? Berne?). Autre incertitude. Quel passé guide l’avenir? La période française? Gallo-romaine? La Rauracie n’est-elle pas un peu sœur des Waldstaetten aux mollets saillants?

Le dernier couplet, plus alerte, annonce un futur radieux: « On constate ici combien la rhétorique et le lyrisme nationalitaire empruntent fortement au registre religieux. Le « Ciel », la « célébration », la « gloire » autant de marqueurs qui reflètent les débuts d’une laïcisation de la société jurassienne d’après-guerre, transposant sur le terrain patriotique, des valeurs religieuses jusqu’alors fortement ancrées ». Phénomène général en Europe: l’apparition de la modernité industrielle éclipse les valeurs traditionnelles au profit de nouvelles idéologies naissantes. Parmi les objets d’études originaux de notre ami jurassien, signalons quelques cartes postales symboliques et le reliquaire de l’étonnant abbé Daucourt. Une carte postale éditée à Saignelégier le ler mars 1916 dénonce la turpitude des colonels Egli et von Wattenwyl accusés d’intelligence avec les Empires centraux puis … acquittés. « Madame Helvétia et ses enfants Berne, Soleure, … [ … ] ont la profonde douleur de faire part aux peuples du monde civilisé du décès de Mademoiselle Neutralité Helvétia [ … ] surprise par une attaque de bocho-influenza compliquée ».

Plusieurs cartes ou documents divers, diplômes du Régiment 9, rappellent les diverses mobs et les liens confédéraux renouvelés. Le document adressé au lieutenant J. Reiser cp III/ 24 revient sur le même thème, mais aussi sur un autre événement particulier : le service d’ordre effectué par les troupes jurassiennes en 1919, à Zürich, lors des troubles sociaux. « Sa riche iconographie mêle une fois encore l’aspect bucolique et touristique d’un paysage jurassien typique (le château de Porrentruy) à une présence militaire, à la fois humaine et technologique qui se veut rassurante ».

Crosse de Bâle, bi-plan helvétique dans un ciel serein. La place semble vraiment inexpugnable. « Hauts sont les monts et terrifiant le donjon. Tout est fait pour dissiper les craintes-infondées?-d’une Ajoie abandonnée à son sort par l’ironie de la géographie. Dans son journal, l’abbé Daucourt, père du musée jurassien de la capitale, témoigne de la même haine « du Boche » et annonce assez clairement la future séparation d’avec Berne. « La terre jurassienne représentant l’Alsace-Lorraine de ce canton patricien ». Pour en savoir plus sur L’aventure du Jura, la Fonction publique a rencontré le sympathique auteur à la Grenette, ce Kornhauskeller fribourgeois, à l’équinoxe de juin.

                            Interview (à suivre)réalisée par Daniel Balmer et Thierry Theurillat, La Fonction publique no 643, octobre 2004.

L’aventure du Jura (II)

Dans son dernier numéro, La Fonction publique a présenté l’ouvrage de Claude Hauser L’aventure du Jura paru aux Editions Antipodes (2004). 25 ans après l’entrée en souveraineté du 23ème canton, 30 ans après le fameux plébiscite du 23 juin, la « question jurassienne » reste ouverte. le mouvement autonome jurassien (MAJ) a déposé une pétition demandant au canton de relancer l’idée de réunification, ce qui implique une redistribution des cartes, un New Deal helvétique. Interview.

LFP: Encore aujourd’hui, le Jura est perçu comme le trublion de Dame Helvétique (cf. les pirates de l’Expo). La réalité est, pour le moins, plus nuancée. Alors canton nouveau ou nouveau canton?

Claude Hauser: A l’origine, le nouvel Etat s’illustre par une constitution novatrice: droit de vote à 18 ans, droit de vote accordé aux étrangers (niveau communal), création du Bureau de la condition féminine (avant la France et tous les cantons), cour constitutionnelle cantonale, politique d’aide au Tiers-monde, défense efficace de la nature (eau), de la langue et la culture françaises (francophonie). De 60 à 75, il y eut une période de contestation ponctuée par toute une série d’événements: affaire des Rangiers, expo 64, FLJ, objecteurs patriotes, actions des Béliers, manifestations à Moutier. La Suisse devient, selon Roland Béguelin, « un faux témoin ». Bien vite, après le partage des biens, le retrait de l’article 138, l’Etat de combat s’est lové dans le moule helvétique. Un historien et acteur engagé comme Jean-Claude Rennwald, par exemple, attribue cet assoupissement à la prépotence du PDC dans le canton. La lecture du Jura libre de ces dernières années nous montre également des préoccupations surtout nostalgiques de l’âge d’or. La commémoration des 25 et 30 ans mime, peu ou prou, celle du 700ème de la Confédération. La politique de l’AIJ participe aussi des habitudes politiques helvétiques. [Malgré tout cela, il est vrai que le Jura a régulièrement voté à gauche et élu à droite. Région périphérique délaissée, le Jura a besoin des interventions du secteur public pour animer l’économie, ndlr.]

« Il convient de mettre en évidence le rôle ambigu joué par le conseiller fédéral Wahlen dans cette normalisation de la situation. D’une part, il prononce son fameux discours de concorde en 63, de l’autre, il dénonce en sous-main, une prétendue idéologie völkisch (Blut und Boden) qui aurait animé les responsables du Rassemblement jurassien. Le combat jurassien a été canalisé par la voie référendaire vers une issue démocratique. Même les Béliers (chemises blanches) étaient « chaperonnés » par des chefs responsables qui ont joué sur la dérision. Ils ont ainsi évité des débordements potentiellement fatals. Les erreurs, les fautes, les maladresses de l’Exécutif bernois ont accéléré le cours-inexorable?-de l’histoire.

Un mot du « Sorbevai » de Virgile Rossel?

Ce texte de 1925 dénonce la germanisation rampante du Jura par des colons alémaniques. Cette thèse, défendue par les élites radicales de l’époque, ne les poussait pas à la rupture, loin s’en faut. Il s’agissait simplement de revendiquer une meilleure prise en compte de la culture française et de l’identité jurassienne. Dans la pièce, figure d’ailleurs un protagoniste alémanique bien intégré. Berne, pont entre les deux cultures, capitale fédérale, doit mieux jouer son rôle, pour défendre la cohésion du canton bilingue.

Helvétisme et romandisme, mouvements maurassiens pour simplifier. Quel est le poids de cette influence?

En effet, l’Action française a fortement marqué les intellectuels romands de l’Entre-de ux-guerres. Le romandisme était surtout actif à Neuchâtel, avec des gens comme Alfred Lombard et Eddy Bauer, deux universitaires qui se distinguaient par leur germanophobie radicale. Plus extrémiste qu’eux, Pierre Guye dénonçait partout et inlassablement le complot « judéo-bolchévico-maçonnique ». L’helvétisme était animé par des écrivains comme les fédéralistes Gonzague de Reynold, les frères Cingria, Regamey et d’autres de la ligue vaudoise. Reynold méprise la démocratie, exalte les vertus du mysticisme chrétien et du sacrifice pour la gloire de la patrie. Dans un remake de la Gloire qui chante, il tend l’oreille, pour entendre la troupe jurassienne: « Ce sont les hommes d’une marche avancée, d’une marche frontière que toutes les guerres d’Europe ont toujours menacés. Ce sont les hommes d’une terre guerrière. Ils ont aussi leur épopée et leur gloire, aussi, a chanté… ».

La « Troisième force », chronique d’un échec annoncé?

Solution tardive. Les notables représentant ce courant de sage compromis ont été vite discrédités par les deux mouvements antagonistes, pressés d’en découdre.

Les Jurassiens et l’armée, de Léon Froidevaux à Andy Gross, y a-t-il une constante antimilitariste dans le Jura?

La réponse doit être nuancée, car les personnes, comme les situations évoluent. Alfred Ribeaud, par exemple, s’engage pour une longue tournée de conférences en faveur de l’armée puis, en 1917, lance l’idée de créer un nouveau canton et suffoque son auditoire. Rédacteur du Petit jurassien, Léon Froidevaux dénonce vivement le drill à l’allemande imposé par le futur général Guisan aux troupes jurassiennes, sans mettre en doute l’existence de l’armée. Chacun( e) connaît la fameuse affiche de Coghuf, symbole de la lutte victorieuse des « Taignons » contre le DMF, mais peu de gens savent que le même artiste avait, précédemment, joué son rôle de propagandiste de la défense spirituelle du pays. Ainsi en est-il aussi des officiers patriotes comme Berberat, Cuttat et d’autres. L’Ajoie a donné le jour à deux mythes: le Fritz et la Gilberte, personnages emblématiques et polysémiques. La sommelière de Courgenay immortalisée par le refrain de Ladislav Krupski, alias Hans in der Gand, incarne une Madelon locale consensuelle. La charismatique Gilberte maîtrise le suisse-allemand et la couture ». Aujourd’hui, le restaurant bien rénové, (re)devient un lieu important de pélerinages touristico-patriotiques. Erigé en 1924, le gymnaste Fritz, oeuvre du sculpteur neuchâtelois l’Eplatenier, a une charge emblématique renouvelée pendant la deuxième Guerre mondiale. La manifestation du 30 août 1964 tourne à l’émeute et stupéfie le pays. « La Question jurassienne a modifié l’image de l’armée dans le Jura. L’armée de milice, l’idéal du citoyen-soldat [ … ] a laissé la place à l’armée, institution devenue, pour les séparatistes, le stéréotype négatif de l’immobilisme suisse et du militarisme; pour les antiséparatistes, il demeure le symbole du statu quo et de l’attachement aux valeurs de la culture politique suisse: ordre, patrie, démocratie garantie par des citoyens en armes ».

On a parlé d’irrédentisme, de volonté hégémonique voire impérialiste de la France gaulliste des sixties…

Le fameux « Vive le Québec libre » a, en effet, traumatisé bien des gouvernants. Le développement du réseau culturel de la francophonie irrite passablement notre gouvernement. A part Viatte, intellectuel jurassien établi au Québec, personne ne militait vraiment pour le rattachement de la patrie jurassienne à la France. Jeune diplomate, Guy Hentsch, chargé d’établir « un rapport détaillé sur l’Association européenne de l’Ethnie française et la Question jurassienne» est obligé de calmer le jeu. Certes, De Gaulle a refusé de livrer le « terroriste » Hennin réfugié en France, mais malgré des kilos de fiches et d’écoutes téléphoniques systématiques, la collusion De Gaulle-Béguelin reste fantasmatique. [Cette affaire a suscité, pendant des années, de nombre de fantasmes. Les séparatistes étaient alternativement ou simultanément stipendiés par la France, le Vatican ou la Chine populaire, ndlr].

La période rose du combat 1960-75. Quelques épisodes importants ?

L’époque a été agitée dans le monde entier: guerre du Vietnam, contestations estudiantines aux USA puis en Europe, mouvements hippies et alternatifs et écologistes, printemps de Prague puis invasion de la Tchécoslovaquie, décolonisation, droits des peuples et des gens à disposer d’eux-mêmes. Cette onde de choc frappe de plein fouet notre pays. Un courant socialiste autogestionnaire se développe dans le futur canton. Depreux, militant du PSU et favorable à l’indépendance algérienne est bien reçu à Delémont par une jeunesse politisée. Naissance du PCSI (Parti chrétien-social indépendant), situé à la gauche du PDC. Immédiatement engagé dans la lutte patriotique, le jeune parti est également actif dans l’ouverture du Tiers-monde, dans le refus du nucléaire et pour la transformation de l’école jugée conservatrice. [Même le parti radical réformiste, un petit clone séparatiste, met à son programme électoral une teinte subversive en réclamant la suppression de l’héritage, idée empruntée à son gourou JJSS, Jean-Jacques Servan-Schreiber, directeur de l’Express et fondateur du parti radical réformiste lotharingien, ndlr]. Devenu bohème à Paris après la fin de l’aventure intellectuelle des « Portes de France », Jean Cuttat revient au pays avec un air de Che Guevara. De nouveaux objecteurs-patriotes, même officiers, remettent leur barda sur les marches du Palais bernois. « Il avait plu en fin d’après-midi [fête du Peuple à Delémont]. Beaucoup de gens avaient laissé tomber les tracts par terre et avaient forcément marché dessus. Un jeune homme en larmes, un fervent de nos soirées de poésie, les bras chargés de maculature souillée, me tomba dans les bras, disant: « ce peuple est indigne. Ces gens sont ignobles, ils ont marché sur tes poèmes »(9 VI 1 1992).

Querelle dans la famille socialiste: OryHauri-Buser contre Roland Béguelin exclu du parti. Machiavélisme?

Roland Béguelin a été critiqué d’abord par les jeunes socialistes proches du PSU français et favorables à l’indépendance algérienne. Sous le nom d’Helvéticus et dans la revue du royaliste Pierre Boutang, le secrétaire général du mouvement autonomiste avait vertement critiqué La Sentinelle, organe socialiste favorable aux thèses du PSU. Partisan inconditionnel de la Grande Nation, Béguelin soutenait ses camarades Lacoste, Pineau et Guy Mollet de la SFIO, partisans, comme Mitterrand, de l’Algérie française. Ory se sert de ce prétexte pour aggraver le harcèlement de son ennemi préféré. Officier à l’armée, André Ory informe le gouvernement des moindres faits et gestes des séparatistes qu’il traite de « nazillons ». « En coulisses et dans les contacts entretenus au plus haut niveau fédéral, les responsables du dossier Jura n’hésitent pas à qualifier les séparatistes de racistes, voire de « nazis » d’obédience française » stigmatisant, anachroniquement, les aspects extrémistes du passé des leaders nationalistes. Cette diabolisation justifie, à leur sens, les mesures de propagande et de contrôle politique instaurées durant cette période, qui touchent, souvent, aux limites des libertés individuelles et d’expression des citoyens ».

Le fameux budget de l’économiste Roy, frère du secrétaire général adjoint, alias « Papier-carbone », distribué à tous les ayants droit au vote historique, ne péchait-il pas par excès d’optimisme?

Sans doute, mais il avait été établi pour un espace autre (6 districts) et dans un contexte économique plus euphorique.

                        Interview (à suivre)réalisée par Daniel Balmer et Thierry Theurillat, La Fonction publique no 644, novembre 2004.

Histoire de sous…

Claude Hauser, professeur associé d’histoire contemporaine générale et suisse à l’Université de Fribourg, vient de sortir L’AVENTURE DU JURA, fascicule d’environ 160 pages, à l’écriture plutôt poussive, et à la présentation assez revêche. L’ouvrage est ainsi annoncé:

« CE LIVRE RETRACE L’HISTOIRE D’UN ESSOR IDENTITAIRE ET NATIONAL QUI FUT TOUT SAUF TRANQUILLE, SUIVANT OU ANTICIPANT LES GRANDES CRISES ET ÉVOLUTIONS DU XXe SIÈCLE: POUSSÉES NATIONALISTES ET IDÉAUX FÉDÉRALISTES, CULTURE DE GUERRE ET ANTIMILITARISME, DÉCOLONISATION ET MOUVEMENTS CONTESTATAIRES… LE PROCESSUS QUI A ABOUTI À LA CRÉATION DU 23e CANTON SUISSE A EN EFFET LARGEMENT DÉPASSÉ LES LIMITES D’UN CONFLIT BERNE-JURA, EN ÉBRANLANT LES FONDÉMENTS POLITIQUES DE LA CONFÉDÉRATION. »(OUF! Note de la rédaction).

On ne saura jamais jusqu’où va l’impartialité des historiens, mais une chose paraît certaine, le travail de Hauser est honnête et non dénué d’intérêt. La page de garde nous dit:

REMERCIEMENTS

Cet ouvrage a reçu l’appui du Pour-cent culturel Migros, de la République et Canton du Jura, de la Délégation jurassienne à la Loterie romande, de Clientis Banque Jura Laufon et de Swisslos, Office de la culture canton de berne

Cela fait plaisir de constater que de jeunes historiens de chez nous sont aidés par des instances helvétiques. Saluons le canton de Berne qui contribue à la publication d’un travail racontant une de ses pires défaites.

En revanche, quitte à nous faire passer pour des mesquins, cette note en dernière page nous étonne quelque peu:

Impression

Marcel Bon Imprimeur – 70000 Vesoul

Avril 2004

On enseigne dans une université bien de chez nous, on traite un sujet bien de chez nous (qui a coûté très cher à de nombreux Jurassiens, et même à des imprimeurs qui se sont vachement mouillés), on est subventionné par des bastringues bien de chez nous, on sera lu et acheté par un public bien de chez nous, et on va imprimer… en France. Faut dire que l’éditeur s’appelle: « Antipodes & Société d’Histoire de la Suisse romande. » Antipodes ! Avec un tel nom, encore heureux que ces gens n’aillent pas imprimer en Australie. Au fait, un antipodiste, n’est-ce pas un acrobate qui, couché sur le dos, écrit avec ses pieds?

Voilà un auteur placé pour foncer dans le sens de l’histoire: la délocalisation. Hauser est un admirateur de Jacques Brel: « T’as voulu voir Vesoul et on a vu Vesoul… »

La Tuile no 396, septembre 2004