Confrontations (1994-2004)

Meizoz, Jérôme,

2005, 306 pages, 21 €, ISBN:2-940146-68-3

Dix ans de critiques littéraires. Dix ans de découvertes heureuses et de débats passionnés…Un choix parmi des articles parus dans la presse ou en revues, en Suisse et en Europe. Leur point commun: l’expérience d’une « confrontation »-faire front, affronter ou monter au front.

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Description

Dix ans de critiques littéraires. Dix ans de découvertes heureuses et de débats passionnés…Un choix parmi des articles parus dans la presse ou en revues, en Suisse et en Europe. Leur point commun: l’expérience d’une « confrontation »-faire front, affronter ou monter au front.

Partis pris, interventions vives pour certaines, écrites le plus souvent hors demande académique. Confrontations pour se situer dans le différend suscité par toute prise de parole. Dans notre pays mutique, la polémique littéraire se fait décidément trop rare!

Table des matières

Avant-propos

Littératures

Provinces et périphéries

  • Culture et dépendance
  • “Un ciel ou une geôle”: poétique de la province en Suisse francophone (XXe siècle)
  • Quand les francophones malmènent joyeusement le français
  • Une somme historique et littéraire
  • Machineries et coulisses d’une identité littéraire

Tempêtes dans un verre d’eau

  • La posture littéraire en soixante bougies (Chessex)
  • Osera, osera pas? (Chessex)
  • Un impayable préfacier (Chessex & Calame)
  • Conflits de compétences et luttes de classements dans la critique littéraire romande

Littérature « romande »

  • Chappaz l’éperdu
  • Maurice Chappaz sacré poète français
  • Chappaz un épique anti-socialiste?
  • Le moment Rimbaud (Chappaz & Lovay)
  • Lovay, la fuite créatrice
  • Voyage au centre de la fiction (Lovay)
  • L’oreille percée (sur Aline de Ramuz)
  • La « différence » créatrice de Gustave Roud
  • Les usages du ciel: Nicolas Bouvier
  • L’écrivain et le verbe manquant (Pasquali)
  • Lieux et « creux » de parole (Pasquali)
  • Des bêtes humaines (Noëlle Revaz)
  • Le Paris des Suisses
  • Le roman familial de Corinna Bille
  • Les ambivalences du retour (Nicolas Couchepin)
  • Eugène ou la fabulation froide
  • Eugène n’est pas son nom

Editions, éditeurs

  • Pour rouvrir l’enquête sur Novgorode (Cendrars)
  • Les éditeurs aussi ont une histoire
  • Aux origines idéologiques de l' »Alliance culturelle romande »
  • Une aventure éditoriale fribourgeoise

Collaboration, épuration: Céline, Morand and Co

  • Les pamphlets de Céline, entre histoire et poétique
  • Louis, Marcel et Gaston
  • Céline, écrivain au cachot
  • Littérature et politique: dilemmes des « années noires »
  • Collaboration, épuration: aigreurs de perdants

Institutions littéraires

  • La constitution du label surréaliste
  • Les effets paradoxaux de la « grandeur » littéraire
  • Qu’est-ce qu’un écrivain?
  • Vers une géopolitique des littératures
  • Les prix littéraires ou la fabrique des fétiches
  • Menaces sur le monde du livre?
  • Qu’est-ce qu’un intellectuel français?
  • Intellectuels: la tentation du panorama

Heureuses lectures

  • Savitzkaya domestique
  • Dans le déambulatoire (Sarraute)
  • Michon, le fils
  • Un Kundera méconnu
  • Alberto Nessi, lyrique engagé
  • Le chômeur et son ombre (Jörg Steiner)
  • La « seule évidence » de Markus Werner
  • Tabucchi, romancier de l’espace public
  • Les écritures croisées: Paulhan/Saint-Hélier
  • Pierre Bergounioux, écrivain de la mémoire longue

Valeurs sûres!

  • Parlez-nous des « grands auteurs », mon cher!
  • La littérature des « valeurs sûres »

Politiques

Coups de gueule

  • Quand Christoph Blocher réinvente la peinture nationale (Blocher & Anker)
  • Va-t-on laisser faire les apprentis sorciers?
  • A qui profite l’éducation boursière?
  • Valais: Politique sous la loupe
  • Le Nouvelliste et les beaux jours du dictateur (suivi d’un Rectificatif)
  • Antisémitisme: le latent et le militant
  • Un amour de Serbie!
  • Journalistes sous influence
  • Adolf Muschg empêche  la Suisse de penser en rond
  • Etienne Barilier, arbitre athénien
  • Iraki freedom. Serons-nous les résistants dont un monde libre a besoin?

Pierre Bourdieu

  • « La sociologie est un sport de combat »
  • Contre le « fléau » néo-libéral (Entretien)
  • Qui a peur de Pierre Bourdieu?

Presse

Jérôme Meizoz invite à la polémique dans un recueil réunissant dix ans critique littéraire et politique. Des propos stimulants.

La critique est un sport de combat et d’endurance

Jérôme Meizoz n’a pas 40 ans et déjà une impressionnante bibliographie, où la fiction se ménage une petite place (3 titres) parmi une dizaine d’essais littéraires. Enseignant à l’Université de Lausanne, il intervient parfois dans les colonnes de la presse et de revues. Confrontations offre un choix d’articles écrits ces dix dernières années en réaction à des propos littéraires et/ou politiques. « Dieu sait si ces deux catégories n’existent pas toujours à l’état séparé », note l’auteur en préface, où il regrette le peu de goût pour la polémique en « notre pays mutique ». Car la littérature évolue (surtout) par conflits, un mouvement naissant en réaction à un autre, à l’instar du Nouveau Roman qui voulait la peau du réalisme.

Ainsi, pas question de faucher les jeunes pousses (Noëlle Revaz, Eugène, Nicolas Couchepin), traitées ici avec bienveillance. D’ailleurs, les coups de griffes portent moins sur des êtres que sur des questions de taille telles que le besoin de grandeur de l’écrivain ou cette « tendance à se diriger automatiquement vers la lumière de Paris ». Ce trait, voire ce défaut, s’appelle le « lutétiotropisme» en sociologie, que Jérôme Meizoz a étudié.

La critique est aussi un lieu où s’expriment des liens de filiation (Pierre Bourdieu, Maurice Chappaz), de fraternité ou de complicité littéraires (Jean-Marc Lovay, Pierre, Michon.). Et lorsque l’auteur dit ne pas avoir su bien entendre Adrien Pasquali de son vivant, il a cette modestie indispensable à tous ceux qui réagissent à chaud face à une œuvre en construction. En somme, la critique est un sport complet-de combat, d’endurance, d’agilité-que Jérôme Meizoz pratique d’un ton vif et stimulant.

ELISABETH VUST, 24Heures, 5 décembre 2005

Dans ce pays de consensus, la littérature n’est pas un terrain où l’on s’affronte. La polémique littéraire y est un genre plutôt rare et les seuls débats passionnés acceptables concernent la politique en période électorale. On peut le regretter. Il y a pourtant quelques bonnes exceptions, parmi lesquelles il faut saluer les interventions critiques de Jérôme Meizoz.

Ce sympathique volume réunit un choix d’articles de l’auteur, parus dans la presse ou dans divers revues durant dix ans, dont la caractéristique commune est le parti pris et la confrontation. Prises de positions vives, traits acérés, propos iconoclastes qui n’hésitent pas à toucher aux vaches sacrées qui en font parfois les frais, la plume est élégante et bien acérée. Tout respire l’intelligence et la liberté.

Regroupé sous deux rubriques distinctes, la littérature et la politique, ces articles, qui redonnent vie à un passé récent, se lisent avec bonheur, comme on sirote un petit alcool qui vous détend et vous ragaillardit.

Pierre Emonet, Choisir, no 559/560, juillet-août 2006

Comme le titre le suggère, les articles de Jérôme MEIZOZ recueillis dans ce volume, et précédemment parus en revue pendant une décennie (de 1994 à 2004), sont reliés entre eux par un trait commun, c’est-à-dire « leur statut de confrontations » (« Avant-propos », p.7). Ils ont été écrits, en fait, « le plus souvent hors demande académique », dans un esprit de confrontation et de débat avec des positions et des discours autres, « propos littéraires et/ou énoncés politiques » (Ibid.).

Dans le volume, les articles de Jérôme MEIZOZ-critique, écrivain et professeur à l’Université de Lausanne-ont été distribués en deux rubriques principales. « Littératures et Politiques », chacune articulée en plusieurs sous-sections thématiques. La partie littéraire, qui réunit plus de cinquante écrits consacrés en majorité, mais non exclusivement, à des auteurs suisses francophones est décidément la plus vaste et la plus importante.

Dans la première section, « Provinces et périphéries » (pp.11-40), se trouvent en particulier les articles de Jérôme MEIZOZ concernant le rapport de la Suisse francophone à la France dans les domaines de l’éducation, de la création littéraire et de la culture en général. Comme dans les autres sections, des comptes rendus sont aussi bien reproduits.

La section suivante, « Tempêtes dans un verre d’eau» »(pp.4158), réunit des réactions polémiques et critiques de l’auteur au sujet de certains cas éditoriaux (notamment à propos de l’œuvre de Jacques CHESSEX). Comme dans tout le volume, les articles et les comptes rendus de MEIZOZ se terminent toujours avec une référence précise-rajoutée, pour plus de clarté, dans cette édition en volume-aux textes cités ou recensés. Dans l’article, très pénétrant, « Conflits de compétence et lutte de classements dans la critique littéraire romande » (pp.51-58), l’auteur dresse en particulier un tableau éclairant sur les superpositions de compétences qui se produisent entre les milieux académiques, la presse et les éditeurs dans leur activité de sélection et dans leur rôle de consécration des écrivains. La section « Littérature romande » (pp.61-130) rassemble plusieurs études et comptes rendus écrits lors de la parution d’ouvrages-aussi bien que de carnets, de correspondances, de cahiers, de journaux intimes-d’auteurs suisses comme Maurice CHAPPAZ, Marc LOVAY, Gustave ROUD, Nicolas BOUVIER, Adrien PASQUALI, Noëlle REVAZ, Corinna BILLE, EUGENE.

Les textes qui composent la section suivante, « Édition, éditeurs » (pp.131-147), comptent une analyse des critères éditoriaux des Poésies complètes de Blaise CENDRARS parues chez l’éditeur Denoël en 2001 et les comptes rendus de quelques volumes consacrés à l’histoire des maisons d’édition en Suisse romande. La section « Collaboration, épuration: Céline, Morand and Co » (pp. 149-168) contient par contre, après trois comptes rendus consacrés à des essais et à des publications relatifs à CÉLINE, un article portant sur le fonds de manuscrits de la Bibliothèque Cantonale et Universitaire de Lausanne où se trouve la correspondance entre Paul MORAND et Jacques CHARDONNE, écrivains français qui toutefois passèrent en Suisse une partie importante de leur vie.

Encore des comptes rendus et des articles composent la section, très intéressante, intitulée « Institutions littéraires » (pp.149-168), où Jérôme MEIZOZ aborde de façon claire et intelligente des thèmes aussi capitaux que la fonction des prix littéraires et leurs retombées sur l’identité sociale des auteurs, le statut de l’écrivain, le système des traductions, le rapport entre littératures mineures et littératures des pays dominants, la nouvelle organisation des groupes éditoriaux.

La section « Heureuses lectures » (pp.199-235) est plus hétérogène, car elle réunit des commentaires et des articles de l’auteur au sujet de lectures d’ouvrages qu’il a particulièrement aimés au fil des années. On y trouve donc cités les auteurs les plus variés, d’Eugène SAVITZKAYA à Nathalie SARRAUTE, de Pierre MICHON à KUNDERA, d’Alberto NESSI à Jörg STEINER, de Markus WERNER à Antonio TABUCCHI, de Pierre BERGOUNIOUX à la correspondance entre PAULHAN et SAINT-HÉLlER. Un seul compte rendu et un article donnent vie enfin à une toute dernière section littéraire, Valeurs sûres! (pp.239-24.). Les dernières cinquante pages du volume, par contre, sont occupées par la rubrique Politiques, qui est organisée autour de deux axes génériques: Coups de gueule et Pierre Bourdieu. Parmi les nombreuses interventions, on peut signaler le compte rendu d’un livre (Suzanne CHAPPAZ, Claudia DUBIUS, Tribuns et tribunes, Sion, Éditions des Musées cantonaux, 1995) entièrement consacré aux spécificités du discours politique dans le canton du Valais, une réflexion sur les positions du quotidien valaisan Le Nouvelliste, aussi bien qu’une brève analyse de l’antisémitisme en Suisse.

La tonalité passionnée des articles et les prises de position décidées et argumentées de l’auteur ont le mérite de nous introduire dans le vif de la vie culturelle et littéraire de la Suisse romande et dans les mécanismes parfois méconnus des choix éditoriaux (au croisement, notamment, du système éditorial suisse et de la plus puissante édition française), aussi bien que dans les polémiques et dans les débats qui agitent la presse helvétique et les milieux intellectuels de la Suisse francophone.

Sara Arena, Ponts